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L'avertissement: Quand doit-on adresser un avertissement?

En raison d'une réglementation lacunaire, il subsiste de nombreuses incertitudes juridiques dans le CO lorsque l'on adresse un avertissement. Voici ce dont il faut tenir compte.

04/01/2022 De: Harry F. Nötzli
L'avertissement

Quand doit-on adresser un avertissement?

L'avertissement, souvent aussi appelé blâme, réprimande ou encore rappel à l'ordre, n'est pas réglementé de manière explicite dans le code des obligations. Il est toutefois d'un usage très répandu dans la pratique et son admissibilité n'est pas remise en question. L'employeur peut ainsi, en matière de violation de contrat de la part d'un collaborateur, de non respect de consignes, de dispositions ou encore de règles de conduite, réprimer les errements en question par le biais d'un avertissement. C'est ce que l'employeur fera surtout en cas d'infractions mineures si ce dernier est toujours intéressé à poursuivre sa collaboration avec l'employé concerné. Etant donné que chacune des deux parties est libre de résilier le contrat de durée indéterminée (art. 335 al. 1 CO), l'employeur peut également mettre un terme au rapport de travail de façon ordinaire sans qu'il doive pour autant se fendre d'un avertissement préalable.

Une résiliation avec effet immédiat requiert un avertissement préalable

S'il s'agit de résiliations avec effet immédiat, les tribunaux exigent que l'on adresse un avertissement préalable en cas d'infractions mineures aux règles de conduite avant que le collaborateur en cause puisse être congédié avec effet immédiat s'il réitère son incartade. Les avertissements ne jouent toutefois pas seulement un rôle dans le cadre des résiliations, mais ont aussi leur importance en matière de certificats de travail, d'augmentations de salaire, de promotions au sein de l'entreprise, etc.

La forme écrite est recommandée

Etant donné que l'avertissement n'est pas réglementé par le code des obligations, aucune forme particulière n'est donc requise. Les avertissements peuvent être adressés par oral, par courriel, SMS ou par fax. Cependant, dans le cas d'un courriel ou d'un SMS, il peut s'avérer ardu de prouver que le destinataire l'a bel et bien reçu. C'est pourquoi l'on recommande, afin de s'éviter de telles complications, de notifier l'avertissement soit en courrier recommandé, soit en demandant au destinataire d'en accuser réception. En termes de formulation de l'avertissement, tous ne s'accordent pas sur son contenu, certains éludent le sujet ou d'aucuns en minimisent encore drastiquement la portée. Le collaborateur ne doit pas nécessairement y consentir puisqu'il ne s'agit pas, en cas d'avertissement, d'un acte juridique bilatéral mais d'une injonction unilatérale de l'employeur. De même, il n'est pas nécessaire que le collaborateur soit entendu au préalable, même si un tel procédé serait à même de renforcer l'acceptation de la démarche.

Fonction de réprimande et d'avertissement

Un avertissement rédigé de manière correcte a toujours fonction de réprimande et d'avertissement. L'avertissement remplit sa fonction de réprimande lorsque l'employeur fait précisément état (et non pas seulement de manière sommaire) d'un comportement inapproprié et/ou d'une prestation insuffisante et qu'il est en mesure de citer des faits précis. La fonction d'avertissement remplit pleinement son rôle lorsqu'il est clairement indiqué au collaborateur que son comportement ne sera plus toléré et qu'en cas de récidive, celui-ci devra en tirer les conséquences. Il est recommandé, en la matière, de ne pas restreindre les conséquences possibles à une résiliation avec effet immédiat, mais de choisir une formulation plus large. On pourrait imaginer quelque chose comme : "... en cas de récidive, nous nous réservons le droit de prendre d'autres mesures allant jusqu'à la résiliation avec effet immédiat de votre contrat de travail."

Pas de limitation à la liberté de résilier

En adressant un avertissement, l'employeur ne se voit pas limité en matière de liberté de résilier ledit contrat (art.335, al. 1 CO). A ce propos, il convient toutefois de rappeler qu'il existe des règlements du personnel qui, en cas de comportement fautif de la part du collaborateur, prévoient des dispositions allant d'un premier, d'un deuxième voire jusqu'à un troisième avertissement avant que le collaborateur en question ne doive s'attendre à de sérieuses conséquences. De telles dispositions peuvent être interprétées, selon leur formulation, comme une limitation librement consentie de la liberté de résilier. C'est pourquoi il convient de se poser la question de savoir si elles ont leur place dans le cadre du règlement du personnel.

L'employeur peut tout aussi bien mettre un terme au rapport de travail de manière ordinaire dans la mesure où le collaborateur concerné se comporte bien après avoir reçu un avertissement. Il faut toutefois garder à l'esprit, qu'en telle situation, une éventuelle résiliation abusive pourrait être invoquée (art. 336 CO). Ainsi, si l'employé se comporte de manière irréprochable après avoir été averti et qu'il est enclin à croire ne pas devoir s'attendre à des mesures relevant du droit du personnel, ce dernier sera déçu en cas de résiliation et interprétera l'attitude de l'employeur comme un comportement contradictoire.

A quelle occasion une résiliation est-elle justifiée?

Si le collaborateur concerné se rend coupable de nouveaux manquements, l'employeur est alors en droit de mettre ses menaces à exécution. Il n'est pas exigé que le collaborateur commette à nouveau des erreurs de même acabit pour qu'il risque d'être licencié. Le Tribunal fédéral a ainsi considéré que même si certains reproches en partie injustifiés étaient mentionnés dans l'avertissement, cela ne signifiait pas pour autant que l'avertissement adressé au collaborateur en question, en raison de son comportement fautif, n'avait plus de raison d'être (BGE 4A_101/2012 du 31.05.2012).

Et justement, en matière de résiliation avec effet immédiat, l'employeur doit être conscient que n'importe quel comportement fautif mineur ne justifie pas un licenciement immédiat, même si un avertissement a été notifié au préalable. Le tribunal décide, selon les circonstances, s'il existe une raison importante qui rend impossible la continuation des rapports de travail (art. 337 al.2 CO). Il s'agit aussi de considérer la gravité des nouveaux manquements. S'il s'agit d'un manquement bénin, la résiliation avec effet immédiat, à mon avis et malgré un avertissement préalable, s'avère être injustifié dans de nombreux cas de figure. Toujours est-il que le Tribunal administratif fédéral a considéré que des erreurs antérieures et connues de l'employeur - s'ajoutant à de nouveaux manquement, qui, en soi, ne justifient pas un licenciement - pouvaient à elles seules justifier la résiliation immédiate du contrat de travail pour autant qu'elles aient fait l'objet d'un avertissement en temps voulu (TAF, jugement A-897/2012 du 13.08.2012).

Durée d'effet limitée

Les avertissements ne jouent pas seulement un rôle dans le cadre de la résiliation du contrat de travail. Ils peuvent également avoir des effets négatifs en matière d'augmentation de salaire, de promotion au sein de l'entreprise ou de qualifications pour le certificat de travail. Un collaborateur ayant fait l'objet d'un avertissement ne dispose que de très faibles possibilités de contester celui-ci. Le collaborateur impliqué n'a, en l'occurrence, pas la possibilité d'attaquer l'avertissement en tant que tel devant un tribunal. Il est donc important de savoir pour ce dernier si un avertissement jouit d'une durée illimitée où s'il s'érode avec le temps. Le Tribunal arbitral de Bâle a - à mon avis à raison - récemment admis, qu'en règle générale, la durée de l'avertissement ne devait pas excéder six mois (JAR 2012 S. 435).

De telles règles générales doivent toutefois être abordées avec prudence. Ce sont les circonstances inhérentes à chaque cas qui doivent rester décisives. Il y a donc une différence entre un collaborateur ayant commis une erreur bénigne il y a de cela deux ans et qui maintenant ne se comporte pas de manière conforme aux attentes et un collaborateur qui a d'abord commis une erreur grave et qui en a commis une à nouveau. Et s'il fallait en tirer une règle générale, ce serait la suivante : "Plus grave est le manquement réprimandé et plus récent est l'avertissement, plus il faut en tenir compte".

Examen régulier du dossier personnel

Le Préposé fédéral à la protection des données recommande de procéder à l'examen régulier des dossiers personnels (tous les deux ans), les données n'étant plus nécessaires devant toutefois être détruites. L'avertissement fait partie des données concernant le collaborateur (art. 3, let. a LPD). L'avertissement et tous les documents y afférents doivent être détruits aussitôt qu'ils ont perdu toute pertinence (art. 328b CO en relation avec l'art. 15 al.1 LPD). Lorsque cela est à l'ordre du jour, l'on procède au cas par cas et selon les circonstances données.

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