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Conflits au travail: Comment gérer les coqs de combat?

Les rapports de travail ouvrent la porte à une multitude de conflits au travail entre l’employeur et les employés. L’entreprise dispose de différentes mesures disciplinaires; mais des obligations d’assistance lui incombent également.

13/04/2022 De: Marc Ph. Prinz, Florian Schaub
Conflits au travail

Conflits au poste de travail

Les rapports de travail contiennent bien plus de choses que simplement la prestation méprisable de «travail contre de l’argent». Les obligations principales des parties (prestation de travail du collaborateur et paiement du salaire de l’employeur) sont complétées par des obligations accessoires réciproques. Les collaborateurs sont astreints à respecter la fidélité et la loyauté (art. 321 a CO) et doivent suivre fondamentalement les injonctions et les directives de l’employeur (art. 321 d CO). En contrepartie, l’employeur doit préserver la santé et l’intégrité personnelle des collaborateurs, il doit veiller au respect de la moralité dans l’entreprise (art. 328 CO). Dans ce cadre, les rapports de travail peuvent être la source d’une multitude de conflits.

Violation des obligations des employés

Les conflits au travail classiques résultent d’atteintes aux obligations des employés, notamment la non-satisfaction ou la mauvaise réalisation de la prestation de travail. Les cas typiques d’atteinte à l’obligation de fidélité sont par exemple constitués par un comportement illicite ou non-respectueux envers l’employeur ou les clients, la déconsidération de l’entreprise, la perturbation de la paix au travail, des prestations de travail en faveur de tiers pendant les heures de travail, une infraction à l’interdiction de faire concurrence, l’atteinte aux obligations de confidentialité, etc.

L’employeur peut faire imposer le respect de ces obligations par l’intermédiaire d’une plainte et par une mesure de contrainte, mais en pratique, cela est peu cohérent dans la plupart de cas (notamment en cas de plainte pour d’abandon d’activités concurrentielles ou infractions au secret d’affaires). En cas de refus injustifié de la prestation au travail, l’employeur peut retenir le salaire (art. 324 CO: principe de «pas de travail, pas de salaire». En outre des prétentions en dommages-intérêts peuvent être imputées sur le salaire (art. 323 b, al. 2 CO).

Mesures disciplinaires des conflits au travail: réprimande, avertissement, licenciement, etc.

En règle générale, l’employeur réagira aux infractions contractuelles du collaborateur par le biais de mesures disciplinaires. Parmi elles figurent la possibilité de réprimande ou d’avertissement (avec ou sans fixation d’un délai de probation) ainsi que la résiliation des rapports de travail.

La réprimande est ici la mesure disciplinaire la plus limitée, celle-ci sanctionnant un comportement contraire au contrat ou aux directives. Les réprimandes n’ont pas de conséquences directes en matière de droit du travail et elles sont généralement énoncées par oral dans la pratique.

Par contre, la menace de sanction est liée à un avertissement au cas où le comportement ou la prestation du collaborateur ne viendrait pas à s’améliorer. L’avertissement et la menace de sanction doivent être effectués expressément et de manière claire. Les collaborateurs doivent comprendre les conséquences d’une poursuite du comportement erroné. L’avertissement doit toujours être consigné par écrit à des fins de preuve.

La sanction miroitée par l’employeur est généralement le licenciement avec effet immédiat de rapports de travail. La menace d’un licenciement ordinaire est certes possible, mais, dans ce cas, l’employeur y sera lié. Le choix postérieur de sanction plus limitée est autorisé aussi en cas de menace de licenciement avec effet immédiat.

Parmi les mesures disciplinaires spécifiques figurent ce que l’on appelle des amendes d’ordre (peine pécuniaire, réductions de salaire, travail supplémentaire, déplacement, prolongation de la période d’essai et suspension). Celles-ci requièrent une base spécifique dans le contrat de travail ou dans une ordonnance d’exploitation (art. 38 al. 1 LT) ainsi qu’un descriptif suffisamment précis des mesures disciplinaires et des sanctions existantes.

Conflits au travail entre employés et supérieurs hiérarchiques

Si des conflits naissent entre les collaborateurs entre eux, mais aussi avec les supérieurs hiérarchiques, jusqu’à ce que l’on appelle le «Mobbing» (resp. le «Bossing» dans le cas de supérieurs hiérarchiques envers leurs subordonnés). Par ce terme, le Tribunal fédéral comprend un comportement durable, systématique, inamical et pendant un long intervalle de temps avec lequel une personne est isolée à son poste de travail, limitée ou même éloignée de son poste de travail.

Dans de telles situations conflictuelles, l’employeur est tenu, du fait de son devoir d’assistance (art. 328 CO), de protéger les employés de tout acte qui porte atteinte à leur personnalité. Entrent notamment en ligne de compte les discussions et les efforts de conciliation internes ou externes, la rédaction de règles de comportement, la remise de directives aux auteurs du Mobbing, des déplacements internes ou, en dernier recours, l’énonciation de licenciements.

Attention en cas de licenciement en situation conflictuelle

En cas de licenciement en situation conflictuelle, il faut faire très attention. Certes, le droit suisse du travail connaît le principe de la liberté de résiliation selon lequel l’employeur n’a besoin d’invoquer aucun motif spécifique de licenciement ni de le démontrer. C’est seulement à la demande des collaborateurs que l’employeur doit motiver par écrit le licenciement (art. 355 al. 2; art. 337 al. 1 CO).

Le licenciement par l’employeur est par contre abusif dans des situations où il est énoncé pour des raisons spécifiques de sanction. Dans ce cas, le licenciement reste valable, mais l’employé peut faire valoir, en dehors des dommages-intérêts, le paiement d’une pénalité pouvant aller, selon les tribunaux, jusqu’à six mois de salaire (art. 336 a CO). En dehors des circonstances citées expressément dans la loi (art. 336 CO) (notamment discrimination, résiliation du fait de l’exercice de droits constitutionnels, licenciement préventif ou de rage, etc.), la pratique reconnaît également des circonstances abusives qui ne figurent pas expressément dans la loi, mais qui sont d’une gravité comparable.

Selon celle-ci, non seulement le motif du licenciement, mais aussi la manière dont il a été prononcé peuvent être abusifs. Le Tribunal fédéral a souligné, dans ce contexte, l’obligation d’assistance de l’employeur (art. 328 CO). L’employeur doit exercer son droit de résiliation de la manière la plus préservatrice possible. Dans des situations de conflit, cela signifie que l’employeur enfreint son obligation d’assistance s’il n’a pris préalablement de mesure visant à désamorcer le conflit. Le choix des mesures à prendre dépend, selon les circonstances, du cas individuel et de la nature du conflit. L’employeur dispose de l’ensemble de la gamme des mesures disciplinaires et de RH précitées (discussion et intermédiation, Coaching et convention d’objectifs, réprimandes et avertissements, etc.). Selon les circonstances, la résiliation sera donc considérée comme abusive même dans des cas de Mobbing. L’employeur doit clarifier les reproches de Mobbing et il doit lancer les mesures appropriées contre le Mobbing .

Un licenciement avec effet immédiat du collaborateur n’entre en ligne de compte, comme mesure la plus dure, que sous forme d’ultima ratio. Indépendamment des cas aggravants, comme un délit pénal au poste de travail, une telle action sera rarement considérée comme justifiée sans avertissement. En cas de licenciement abusif avec effet immédiat, l’employeur risque de payer des dommages-intérêts à hauteur du revenu de l’employé pendant son délai ordinaire de résiliation ainsi qu’un montant supplémentaire de pénalité pouvant aller jusqu’à six mois de salaire (art. 337 c CO).

Importance de la gestion de la performance et du conflit en interne

Les déclarations précédentes soulignent l’importance d’une gestion efficace de la performance et du conflit. Les employeurs font bien d’évaluer la performance et le comportement de leurs employés sous la forme d’entretiens périodiques avec eux. Dans ce contexte, il faut procéder à une évaluation correcte et sincère et la documenter. En cas de prestation insuffisante ou de faible engagement, l’employeur doit énoncer les mesures disciplinaires qui sont à sa disposition de manière ciblée et les appliquer sous forme conséquente.

En cas de réprimandes et d’avertissements, il est recommandé d’organiser un entretien personnel entre le supérieur hiérarchique et la personne concernée, une seconde personne du département des RH étant présente pour des raisons de preuve en dehors de la documentation écrite du contenu de l’entretien. Dans la pratique, le déroulement suivant s’est avéré efficace:

  • donner à l’employé la possibilité de prendre position lui-même sur les faits. L’employeur ne doit pas tenter de les réfuter. Au contraire, il doit réaliser une contre-présentation factuelle, donner des exemples et présenter les preuves d’un mauvais comportement de l’employé
  • dans une seconde étape, il faut rechercher ensemble les solutions appropriées. Dans ce contexte, l’employeur doit orienter l’employé vers des indications concrètes en termes de performance et/ou de comportement et des délais probatoires et des conventions d’objectifs doivent être déterminés le cas échéant, puis surveillés de manière ciblée
  • lors de l’entretien de retour d’information, il faut constater si l’employé s’est conduit correctement et si les objectifs fixés de performance ont été atteints. Le cas échéant, des mesures complémentaires doivent être prises

En cas de conflit entre les collaborateurs et leur supérieur hiérarchique, l’employeur doit prendre toutes les mesures appropriées et convenables afin de désamorcer le conflit. C’est seulement si aucun effet n’est contenu qu’une résiliation par l’une ou l’autre des parties peut être prise en considération.

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