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Local commercial: Résiliation et droit de rétention

En ces temps de crise, le retard de paiement de locataire de local commercial est un problème fréquemment rencontré. Se pose la question de la manière de procéder et des possibilités offertes au bailleur.

04/08/2022 De: Pierre Matile
Local commercial

Généralités

D’une manière générale, il convient de rappeler que pour les baux de durée indéterminée et sauf disposition contraire, la résiliation doit intervenir en respectant un délai de congé de 6 mois au moins pour le terme fixé par l’usage local ou, à défaut d’un tel usage, pour la fin d’un trimestre de bail (art. 266d CO).

Il convient aussi de rappeler que la résiliation du bail est une déclaration unilatérale de volonté de l’une des parties au contrat soumise à réception. Dans ce cas, la jurisprudence considère qu’il convient d’appliquer la théorie de la réception dite absolue (ATF 118 II 42). Le point de départ du délai correspond au moment où la manifestation de volonté est parvenue dans la sphère d’influence du destinataire ou de son représentant, de telles sorte qu’en organisant normalement ses affaires celui-ci soit à même d’en prendre connaissance. En ce qui concerne une lettre recommandée, si l'agent postal n'a pas pu la remettre effectivement au destinataire ou à un tiers autorisé à prendre livraison de l'envoi et qu'il laisse un avis de retrait dans sa boîte aux lettres ou sa case postale, le pli est reçu dès que le destinataire est en mesure d'en prendre connaissance au bureau de la poste selon l'avis de retrait; il s'agit soit du jour même où l'avis de retrait est déposé dans la boîte aux lettres si l'on peut attendre du destinataire qu'il le retire aussitôt, sinon en règle générale le lendemain de ce jour (ATF 107 II 189 consid. 2 p. 192 confirmé dans ATF 137 III 208).

Procédure en cas de retard de paiement

Lorsque, après la réception de la chose, le locataire a du retard pour s’acquitter d’un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu’à défaut de paiement dans ce délai il résiliera le bail. Ce délai  est de 30 jours au moins pour les locaux commerciaux. (art. 257d CO).

Résiliation extraordinaire de local commercial

Faute de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d’habitation et de local commercial peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d’un mois. Le formulaire de résiliation officiel dot être utilisé à cet effet. Sinon, la résiliation reste sans effet et on risque de nouvelles pertes de loyer.

Il est donc impossible de résilier les rapports de location sans préavis. Dans ce contexte, il est important de distinguer l’absence de paiements de paiements tardifs de loyers. Le CO ne contient aucune règle déterminant s’il est également possible dans ce cas de dissoudre avant terme les rapports de location. En revanche, selon le Tribunal fédéral, une résiliation extraordinaire pour cause de retard de paiement peut également être considérée comme abusive, par exemple si le bailleur a menacé le locataire de résilier le contrat avant de s’assurer des montants ouverts et s’il demande un montant nettement plus élevé.

Le droit de résiliation s’éteint si le bailleur accepte des loyers pendant une durée prolongée après que l’arriéré a été réglé. Aucune prolongation des rapports de location n’est accordée lorsqu’un congé est donné en cas de demeure du locataire (art. 272a CO).

En cas de faillite du locataire après la délivrance de la chose, le bailleur peut exiger que des sûretés lui soient fournies pour les loyers à échoir. A cet effet, il s’adresse par écrit au locataire et à l’administration de la faillite en leur fixant un délai convenable (art. 266h CO). Si ces sûretés ne lui sont pas fournies dans ce délai, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat.

L’art. 257d al. 2 CO dispose qu’à défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat ; les baux d’habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d’un mois.

L’avis comminatoire doit indiquer le montant arriéré à payer dans le délai de façon suffisamment claire et précise pour que le locataire puisse reconnaître clairement quelles dettes il doit payer pour éviter un congé. Le montant de l’arriéré doit être déterminé (chiffré) ou, tout au moins, déterminable (arrêt 4A_306/2015 du 14 octobre 2015).

Les rappels de paiement servent à montrer au locataire de manière claire et vérifiable quelles créances le bailleur considère comme ouvertes. Cet objectif est atteint si, à la date d’échéance, les mois pendant lesquels aucun paiement n’a été effectué sont listés.

Pour que des loyers non payés soient amortis par compensation, le locataire doit déclarer la compensation au cours du délai de paiement.

En ce qui concerne la notification de l’avis comminatoire, le Tribunal fédéral considère qu’il convient d’appliquer la théorie relative de la réception à l’instar de ce qui prévaut pour les délais de procédure. Ainsi, si le courrier recommandé ne peut être remis directement au destinataire et qu’un avis de retrait mentionnant le délai de garde a été remis dans sa boîte aux lettres ou sa case postale, l’acte est reçu au moment où le destinataire le retire effectivement au guichet de la poste ou, à supposer qu’il ne soit pas retiré dans le délai de garde de sept jours, le septième et dernier jour de ce délai (ATF 119 II 147, confirmé dans l’ATF 137 III 208).

Droit de rétention

Contrairement au bailleur d’habitations, le bailleur de local commercial a, pour garantie du loyer de l’année écoulée et du semestre courant, un droit de rétention sur les meubles qui se trouvent dans les locaux loués et qui servent soit à l’aménagement, soit à l’usage de ceux-ci (art. 268 CO).

Le droit de rétention du bailleur grève aussi les meubles apportés par le sous-locataire dans la mesure où celui-ci n’a pas payé son loyer au locataire. Ne sont pas soumis au droit de rétention les biens qui ne pourraient être saisis par les créanciers du locataire.

Le droit de rétention du bailleur de locaux commerciaux est un droit de gage légal qui a pour but de garantir les loyers écoulés et du semestre courant. Dans l’exécution forcée, il est considéré comme un gage mobilier (art. 37 al. 2 LP) que le bailleur doit faire valoir par la voie de la poursuite en réalisation du gage (art. 151ss LP, ATF 124 III 215). L’art. 283 LP confère au bailleur la possibilité de requérir la protection provisoire de son droit de rétention. A cette fin, l’office dresse un inventaire des objets soumis au droit de rétention et assigne au bailleur un délai pour requérir la poursuite en réalisation du gage. Le bailleur peut requérir la prise d’inventaire en tout temps (art. 56 LP), avec ou sans poursuite préalable (art. 283 al. 1 LP). Le procès-verbal d’inventaire constitue une liste qui recense les biens du débiteur soumis au droit de rétention du bailleur. L’établissement du procès-verbal d’inventaire n’a aucune influence sur l’existence du droit de rétention; cet acte constate uniquement quels objets sont soumis au droit de rétention et ouvre, en tant que mesure conservatoire du droit des poursuites, la possibilité pour le créancier de faire valoir par la suite sa créance avec succès par la voie de la poursuite (ATF 116 III 120 consid. 3c).

Les droits des tiers sur des choses dont le bailleur savait ou devait savoir qu’elles n’étaient pas la propriété du locataire prévalent sur le droit de rétention; il en va de même pour les choses que le possesseur a perdues, qui lui ont été volées ou dont il est dessaisi de quelque autre manière contre sa volonté (art. 268a CO). Lorsque le bailleur apprend seulement au cours du bail que des meubles apportés par le locataire ne sont pas la propriété de ce dernier, son droit de rétention sur ces meubles s’éteint s’il ne résilie pas le contrat pour le prochain terme.

Lors de l’établissement de l’inventaire pour sauvegarde des droits de rétention, l’existence et le montant de la créance en question ne sont pas vérifiés. L’office de poursuite ne peut se refuser que si, de toute évidence, aucun droit de rétention n’existe, par exemple à défaut de rapport de location.

Du point de vue des loyers du semestre courant, on peut dans ce cas demander l’établissement d’un inventaire pour sauvegarde des droits de rétention. Les objets emportés clandestinement ou avec violence peuvent être réintégrés avec l’assistance de la force publique dans les dix jours qui suivent leur déplacement.

Le bailleur doit lancer la poursuite en réalisation de gage pour la créance résultant des loyers dans le délai de 10 jours. Lorsqu’il omet de le faire, la rétention reste sans effet. Le droit de rétention original existe toujours, mais la procédure doit être reprise dès le début.

Le bailleur peut également demander la poursuite en réalisation de gage en même temps que la prise de l’inventaire pour sauvegarde des droits de rétention. Il doit pourtant, dans tous les cas, faire attention. Dans la procédure de poursuite, plusieurs délais doivent être observés.

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