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Le congé immédiat: Délai social

L’efficacité du licenciement avec effet immédiat repose dans sa redoutable logique. En effet, si les circonstances ne permettent pas d’exiger la continuation des rapports de travail, alors ceux-ci prennent fin sans délai (le congé immédiat).

31/01/2022 De: Philippe Ehrenström
Le congé immédiat

Le congé immédiat et «délai social»

C’est ou bien/ou bien, et le caractère tranché de l’alternative est encore renforcé par l’exigence de la réaction rapide de l’employeur. S’il lambine, c’est que les rapports de travail ne sont pas insupportables au point de l’amener à devoir trancher dans le vif, et donc que le licenciement avec effet immédiat est injustifié.

Le Tribunal fédéral a pourtant eu à connaître récemment du cas d’un professeur de gymnastique d’Obwald qui avait multiplié les comportements douteux envers des écolières (ATF 8C_340/2014). L’employeur avait alors fait part de sa volonté de résilier les rapports de travail avec effet immédiat, mais en proposant que les rapports de travail se prolongent néanmoins pendant trois mois au plus. Le professeur a refusé cette offre et a été licencié avec effet immédiat, ce qu’il a ensuite contesté.

A noter 
Le Tribunal fédéral analyse, entre autres éléments, la question du «délai social» («Sozialfrist»), i.e. la proposition faite par l’employeur de prolonger malgré tout les rapports de travail après un licenciement immédiat pendant une durée limitée qui devrait être inférieure au délai de congé ordinaire. Il considère qu’aucune raison de principe ne devrait s’opposer à l’octroi d’un tel délai, dans la mesure où l’employeur qui adopte un comportement «social» ne devrait pas être pénalisé.

Les conditions permettant l’octroi de ce délai devraient dès lors être les suivantes: le congé immédiat doit reposer sur un juste motif, le délai social est clairement différencié du délai de congé ordinaire, l’intérêt public est respecté et le délai est accordé avant tout dans l’intérêt de l’employé concerné.

Le problème est évidemment que ce délai social soulève d’inquiétantes questions logiques. Il faut en effet rappeler que la résiliation immédiate du contrat de travail est l’exercice d’un droit formateur unilatéral, prévu par la loi, et qui confère à une partie la possibilité de modifier unilatéralement la situation juridique de l’autre partie. Elle repose sur une déclaration de volonté du résiliant, sujette à réception. L’exercice du droit formateur doit être clair; la déclaration de volonté du résiliant est, dans le doute, interprétée dans le sens que le destinataire pouvait, de bonne foi, y donner, compte tenu de toutes les circonstances. Dès que la manifestation de volonté de l’employeur est entrée dans la sphère de l’employé, elle produit tous ses effets et le contrat de travail prend fin. Elle est inconditionnelle et irrévocable.

Que sont alors les rapports de travail pendant le «délai social»? Un nouveau contrat de travail de durée déterminée? Mais alors ce serait tout à fait incompatible avec la logique même du licenciement avec effet immédiat, qui exige précisément que la continuation des rapports de travail ne soit plus possible. On pourrait opposer la même remarque si l’on devait qualifier l’opération d’accord sur la fin des rapports de travail.

En vérité, le délai social n’est pas compatible avec le licenciement avec effet immédiat. En juger autrement, c’est s’exposer avec une quasi-certitude à ce qu’un tribunal considère que le licenciement immédiat était injustifié, avec des conséquences très désagréables pour l’employeur.

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