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Certificat médical: Force probante dans le rapport de travail

Des formulations peu claires ou un arrêt maladie rétroactif entraînent régulièrement des conflits en matière de certificats médicaux. Cet article se propose de faire la lumière sur ces divers problèmes, récurrents s’il en est, et de fournir des réponses aux questions les plus fréquemment posées concernant les certificats médicaux.

23/11/2021 De: Leena Kriegers-Tejura
Certificat médical

Quand doit-on présenter un certificat médical?

Lorsque les employés se font porter pâles, ils doivent régulièrement présenter un certificat médical afin de continuer à se voir verser leur salaire alors qu’ils sont malades. Le Code suisse des obligations ne définit toutefois pas à partir de quand un certificat médical doit être présenté. Les conventions collectives de travail ou le droit du personnel du secteur public fournissent parfois des réglementations claires quant aux cas dans lesquels cela s’avère nécessaire. Dans les relations de travail de droit privé, la chose est souvent convenue dans le contrat de travail ou par le biais de règlements. Il est courant qu'un règlement stipule qu’un certificat médical doive être présenté à partir du troisième ou quatrième jour de maladie ; toutefois, il peut également être convenu que le certificat en question doive être produit dès le premier jour d'absence. Il convient de noter que le certificat médical ne constitue pas une preuve stricte. L'incapacité de travail peut également être prouvée par d'autres moyens (par exemple, au moyen de déclarations de témoins) ; le certificat médical n'est qu'un fait allégué par l’une des parties et peut également être réfuté.

L’employeur peut-il interrompre le versement du salaire lorsqu’un collaborateur ne présente pas son certificat médical?

Si une personne ne produit pas de certificat médical lorsque la chose est prévue dans le contrat de travail ou le règlement d’entreprise, l'employeur ne peut pas simplement suspendre le paiement de son salaire. Le maintien du salaire n'est pas lié à la production d'un certificat médical. Il s'agit plutôt d'une exigence réglementaire. Dans ce cas, l'employeur peut envoyer un avertissement au salarié récalcitrant et exiger de ce dernier qu'il présente un certificat médical. Ce n'est que lorsque le salarié en question persiste à refuser de fournir le certificat demandé ou ne fournit pas la preuve de son incapacité de travail d'une autre manière que l'employeur peut cesser de lui verser son salaire.

Que faire en cas de certificats médicaux peu clairs?

Malgré la présentation d'un certificat médical, il peut arriver que certaines questions demeurent en suspens lorsque l’attestation dont il est question est formulée de manière opaque. Si le certificat médical indique qu'une personne est inapte au travail à 50 %, il n'est alors pas clair de savoir si un employé à temps partiel est inapte à raison de 50 % de sa charge de travail réelle ou si l'on entend qu’il est inapte à 50 % dans le cadre d’une charge de travail à temps plein (100 %). Le fait de savoir si un employé est "exclusivement" malade à la place de travail qu’il occupe devrait également être mentionnée pour que l'employeur soit autorisé à supposer une telle incapacité de travail (une incapacité de travail liée à la place de travail, en l’occurrence). Il est vrai que le médecin est soumis au secret professionnel, c'est-à-dire qu'il ne peut divulguer aucun diagnostic à l'employeur. Toutefois, lorsqu'il s'agit de clarifier le certificat médical qu’il délivre, le praticien en question doit fournir les informations nécessaires sans toutefois rendre public le diagnostic qui est le sien.

Quand l’employeur est-il en droit d’envoyer un travailleur consulter un médecin-conseil?

Il se peut également que l'employeur n’accorde aucun crédit à ce qu’il suspecte être un certificat médical de complaisance. Il n'est pas rare que certains employés tombent malades après avoir été licenciés, même en l’absence de signes prétendument avant-coureurs. L'employeur est toujours libre de demander au salarié de consulter à ses frais un médecin-conseil de son choix. La pratique exige que l'employé se conforme à cette demande, même si cela n'est pas explicitement mentionné dans le contrat. La pratique explique cela en vertu du devoir de loyauté incombant à l'employé vis-à-vis de son employeur. Afin d'éviter toute discussion oiseuse, il est conseillé de prévoir explicitement une telle réglementation dans le contrat de travail ou dans le règlement du personnel. Si un employé refuse de consulter le médecin-conseil, l'employeur peut cesser de lui verser son salaire. Avant de le faire, ce dernier doit cependant adresser un avertissement à l'employé concerné. Il convient également de noter que le médecin-conseil est lui aussi astreint au secret médical et qu’il ne peut en aucun cas divulguer de diagnostic à l'employeur, qui est en fait le client. Il ne peut que confirmer ou infirmer le certificat médical délivré par le médecin de famille.

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La force probante des certificats médicaux rétroactifs dans la ligne de mire

La valeur probante des certificats médicaux donne lieu à des litiges répétés dans la pratique. C'est notamment le cas lorsqu'un certificat médical est délivré rétroactivement et rend ainsi caduc un licenciement déjà prononcé. Le Tribunal administratif fédéral s'est penché sur cette question dans son arrêt A-536/2019 du 9 décembre 2019 et, comme dans les décisions précédemment rendues, a considéré qu'un certificat médical délivré rétroactivement pouvait effectivement être vraisemblable.

Dans ce cas précis, les CFF ont licencié un employé souffrant d’une forte dépendance à l’alcool. Deux jours plus tard, le médecin a certifié rétroactivement que l'employé était incapable de travailler pour cause de maladie depuis un jour avant la réception de l'avis de licenciement. Les CFF ont accepté le certificat médical mais non l'effet rétroactif de ce dernier. Le salarié avait informé l'employeur un jour avant son licenciement qu'il prendrait des vacances et n'avait en aucun cas exprimé son inaptitude au travail. Pour cette raison, l’instance inférieure a conclu que la résiliation n'avait pas été prononcée en temps inopportun (c'est-à-dire qu’elle était valide) ; au contraire, l'état de santé de l'employé s'était détérioré après la réception de l'avis de résiliation à un point tel que l'incapacité de travail était survenue après la prononciation de la résiliation du contrat de travail (Faits point E.). Le Tribunal administratif fédéral, en revanche, a estimé qu'un certificat médical délivré à titre rétroactif n'était pas invalide dans tous les cas. Au contraire, si l’on pensait que le certificat était invalide, il convenait alors d’indiquer de manière objective les raisons de mettre en doute son exactitude (consid. 4.6). Dans ce cas précis, l'employé avait déjà souffert auparavant de graves problèmes de santé. Par conséquent, l'effet rétroactif de trois jours ne devait pas être considéré comme excessif dans le cas présent. La résiliation était donc, en l’occurrence, nulle (consid. 4.6).

L’on est maintenant en droit de se demander, en se référant à cette dernière décision, si les employés ne devraient pas toujours consulter un médecin dès qu'ils ressentent les symptômes d’une maladie afin de pouvoir présenter un certificat médical en temps utile. Cela ne semble pas, d’une part, très logique étant donné que les employeurs n'exigent souvent de certificat médical qu'à partir du troisième ou du quatrième jour de maladie. D'autre part, l’arrêt du Tribunal administratif fédéral montre que les certificats médicaux peuvent avoir un effet rétroactif dans des cas individuels. Le fait de savoir si l'effet rétroactif est justifié peut donc encore être décidé au cas par cas.

Bien que cet arrêt relève du droit public du travail, les considérants du Tribunal administratif fédéral sont applicables par analogie au droit privé du travail. Ici aussi, les certificats médicaux rétroactifs ne sont pas sans poser problème tout en n’étant pas fondamentalement inadmissibles. Ces cas sont assez fréquents dans les relations de travail privées. Si un certificat médical n'est contractuellement exigé qu'à partir du troisième ou du quatrième jour de maladie, se rendre chez le médecin avant cela n’a en effet aucun sens. Les doutes concernant les certificats médicaux rétroactifs sont de mise s'il existe d'autres circonstances rendant l'incapacité de travail alléguée suspecte. Les tribunaux cantonaux ont également déjà considéré, en ce qui concerne les rapports de travail de droit privé, que si les certificats médicaux rétroactifs ne devaient pas être, en soi, considérés comme irrecevables, ces derniers avaient toutefois peu de force probatoire s'ils ne reposaient pas sur des constatations objectives mais étaient uniquement fondés sur le ressenti personnel et les allégations des patients (JAR 2008, p. 376, consid. 3.4).

Recommandations de la FMH

La Fédération des médecins suisses (FMH) recommande d'accorder une attention particulière à la notion de transparence lors de l’établissement d'un certificat d'incapacité de travail rétroactif. Le médecin doit prendre en compte ce qu'il a découvert lui-même ou ce qu'il a certifié sur la base des informations fournies par le patient. Le certificat doit en tout cas contenir la date de début de l'incapacité de travail, la date de l’établissement du certificat et la date du premier traitement administré. En principe, l'effet rétroactif ne devrait pas dépasser une semaine. Il s'agit ici de recommandations, c'est pourquoi, dans certains cas individuels, les certificats médicaux ayant un effet rétroactif de plus d'une semaine ne seraient pas automatiquement considérés comme invalides. Il conviendrait alors plutôt d’examiner de plus près les circonstances dans lesquelles le certificat a été établi.

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