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Le droit au salaire: Dispositions en cas de maladie

En cas d’absence du collaborateur pour une cause inhérente à sa personne, l’employeur doit se demander quel est le droit au salaire du collaborateur. Les explications qui suivent apportent de plus amples éclaircissements sur les dispositions légales en vigueur.

25/05/2022 De: Nathalie Berger, Pierre Matile
Le droit au salaire

Pourquoi y a-t-il différents droits au salaire en cas de maladie?

Dans la pratique, une question refait toujours surface: pour quelle raison y a-t-il différents systèmes de droits au salaire en cas d’absence pour cause de maladie? Certains travailleurs perçoivent 100% de leur salaire, d’autres seulement 80% et parfois uniquement après un délai de un à trois jours d’absence. L’existence ou non de systèmes salariaux «injustes» sera étudiée ci-après. Nous noterons toutefois que seuls les droits minimum légaux seront passés analysés: l’employeur a, en tous temps, licence d’octroyer à ses travailleurs des conditions plus favorables que celles prévues par le minimum légal.

Le droit au salaire en cas d’incapacité de travail – Principe de base

Aux termes de l’art. 324a CO :

1 Si le travailleur est empêché de travailler sans faute de sa part pour des causes inhérentes à sa personne, telles que maladie, accident, accomplissement d’une obligation légale ou d’une fonction publique, l’employeur lui verse le salaire pour un temps limité, y compris une indemnité équitable pour le salaire en nature perdu, dans la mesure où les rapports de travail ont duré plus de trois mois ou ont été conclus pour plus de trois mois.

2 Sous réserve de délais plus longs fixés par accord, contrat-type de travail ou convention collective, l’employeur paie pendant la première année de service le salaire de trois semaines et, ensuite, le salaire pour une période plus longue fi xée équitablement, compte tenu de la durée des rapports de travail et de circonstances particulières.

3 En cas de grossesse de la travailleuse, l’employeur est tenu de lui verser le salaire dans la même mesure.

La solution à 100%

Si les parties n’ont pas convenu d’autre chose, le travailleur a le droit de percevoir 100% de son salaire en cas de maladie. Ce droit est toutefois soumis aux limitations suivantes:

Début du droit

S’il s’agit d’un contrat de travail à durée indéterminée, le droit ne prend effet que si les rapports de travail ont duré au moins trois mois ou qu’ils ont été conclus pour plus de trois mois. La personne tombée malade pendant les trois premiers mois de son contrat de travail n’a pas droit à son salaire. Ce droit prend effet à partir du premier jour du quatrième mois du rapport de travail et n’est pas rétroactif. Si le contrat de durée indéterminée prévoit un délai de congé supérieur à trois mois, alors le droit au salaire en cas d’incapacité de travail prend naissance dès le premier jour (ATF 126 III 75). S’il s’agit, au contraire, d’un contrat de travail à durée limitée s’étendant sur une période de plus de trois mois, ce droit prend effet à partir du premier jour de maladie (et ce également pendant les trois premiers mois du rapport de travail).

Un droit limité dans le temps

Lors de la première année de service, le droit minimum légal est limité à trois semaines de versement du salaire. Ce droit est étendu de manière appropriée dès la seconde année de service et, à partir de là, les échelles de droit au salaire (Berne, Bâle et Zurich) sont applicables. Si le minimum prévu par ces dernières est épuisé, aucun droit ne subsiste et ce même en cas de maladie persistante.

Comptabilisation des différents types d’absences

En termes de règles de droit, il s’agit d’un minimum salarial et différents droits au salaire sont cumulés. La personne qui, par exemple, a épuisé les trois semaines de droit au salaire pour cause d’absences telle que maladie, accomplissement de fonctions publiques ou d’arrondissement de salaire lors de service militaire durant sa première année de service, ne dispose plus d’aucun droit en la matière si cette dernière est à nouveau absente durant la même année. Les prestations d’assurance comme celles de l’APG et de la LAA n’entrent toutefois pas en compte.

Un droit qui se renouvelle chaque année?

Ab ovo, ce droit prend naissance chaque année et les prétentions salariales qui ne sont pas en rapport avec celui-ci deviennent caduques. La personne absente d’une année de service à une autre suite à une maladie n’obtient, selon les circonstances, que le maximum prévu de ce à quoi elle a droit pour la nouvelle année en cours.

Contributions sociales

Toutes les contributions usuelles aux assurances sociales doivent être payées via le versement des salaires par l’employeur.

Absences pour cause d’accident ou de service militaire

En cas d’absence pour cause d’accident ou de service militaire, le travailleur perçoit des indemnités journalières versées par l’assurance- accidents ou des allocations perte de gain. Ces prestations d’assurance ne doivent pas être imputées sur le salaire minimum, selon le ch. 1. Si ladite assurance ne couvre pas au moins 80% de la perte de gain, l’employeur doit prendre à sa charge la différence qui en résulte pour une durée limitée, à condition que les dispositions prévues par le ch. 1 soient remplies. Ce dernier point est aussi valable pour les jours de carence prévus par l’assurance-accidents (art. 324b, al. 3 CO). Les cotisations AVS ne doivent pas être déduites des indemnités journalières versées par l’assurance-accidents contrairement aux allocations perçues pendant le service militaire (art. 6 RAVS; art. 19a LAPG).

Allocation de maternité

L’allocation versée pendant les quatorze semaines de congé maternité (éventuellement prolongé de 56 jours en cas d’hospitalisation prolongée du nouveau-né au sens de l’art. 329f CO) est calquée sur les allocations prévues par la LAPG. Elle couvre 80% du salaire actuellement perçu par la travailleuse mais le montant mensuel de l’allocation est plafonné à CHF 7350.– (indemnité journalière maximale = CHF 196.–). Si rien de plus favorable n’a été convenu, le plafond est atteint, quand bien même le salaire antérieur était plus élevé. Aucune imputation sur le salaire minimum ne s’ensuit, conformément au chiffre 1 (ch. 1). Les cotisations AVS doivent d’ailleurs être déduites des indemnités journalières en question.

Accords dérogatoires au ch. 1.

Un accord écrit (ch. 1 ci-dessus), un contrat-type de travail ou une convention collective peuvent déroger aux dispositions de l’art. 324a al. 1 à 3 CO à condition d’accorder au travailleur des prestations au moins équivalentes (art. 324a, al. 4 CO). Dans la pratique, il s’agit surtout d’accords concernant la couverture de la perte de salaire en cas de maladie et ceci est d’ailleurs également prévu par divers CTT et CCT.

Est réputée équivalente la souscription d’une assurance (collective) perte de gain pour cause de maladie qui prévoit la couverture de 80% de la perte de salaire pour au moins 720 jours sur une période de 900, après un délai de carence de 2 à 3 jours, et la prise en charge pour moitié des primes de l’assurance par l’employeur. Si l’accord dérogatoire est conclu conformément à l’art. 324a al. 4 CO, alors l’employeur est libéré de son obligation de verser le salaire, y compris durant le délai d’attente. Si l’assurance prévoit un délai d’attente supérieur à 2 ou 3 jours, l’employeur doit se suppléer à l’assurance et verser le 80% du salaire dès le 2ème ou 3ème jour d’absence. Il est admis de ne pas payer au maximum 2 à 3 jours de travail au début d’une période de maladie (Tribunal fédéral du 4.2.1982 dans JAR 1983 S. 113). Le travailleur devrait en outre avoir le droit, en cas de départ, de demander le passage à l’assurance individuelle. Une telle disposition garantirait en effet au travailleur une protection d’assurance beaucoup plus longue que celle prévue par le ch. 1. C’est également une des raisons pour lesquelles il est justifié (comme dans le cadre de la LAA) de ne devoir couvrir que 80% du salaire perçu. Il faut toutefois veiller à ce que le travailleur absent pour cause de maladie n’obtienne pas d’avantage, étant donné qu’aucunes déductions AVS/AI/APG ne sont prises en compte par ces prestations d’assurance et que bien souvent la part de 13ème salaire est inclue dans le salaire assuré et donc dans l’indemnité journalière perte de gain.

La pratique des tribunaux considère qu’une telle disposition est plus favorable au travailleur que le minimum légal prévu. Il ne s’ensuit, en outre, aucune imputation sur le salaire minimum.

Outre l'équivalence, un éventuel accord des parties doit respecter la forme écrite (cf. art. 11ss CO), laquelle couvrira les points essentiels du régime dérogatoire, à savoir les risques couverts, le pourcentage du salaire assuré, la durée des prestations, les modalités de financement des primes et, le cas échéant, le délai d'attente; un renvoi aux conditions générales d'assurance ou à un autre document tenu à disposition du travailleur est suffisant (ATF 131 III 623 consid. 2.5.1 p. 633 s.); l'accord doit être signé par les deux parties (art. 13 al. 1 CO; arrêt précité du 10 octobre 2014 consid. 4.2.1). 

L’art. 324a al. 4 CO impose la forme écrite. Dans un arrêt du 11 novembre 2020, le Tribunal fédéral a considéré que la forme écrite était destinée à protéger le travailleur et qu’il était ainsi inapproprié de sanctionner le non-respect de cette obligation par la nullité de l’accord (arrêt 4A_517/3010). Cet arrêt est controversé  (cf. notamment arrêt 4A_98/2014 du 10 octobre 2014) et  l’on ne peut exclure le fait que  l’employeur puisse devoir être amené dans ce cas à compléter les indemnités journalières pour que le collaborateur perçoive son salaire à 100% pendant la durée de l’échelle bernoise. Il est donc vivement conseillé à l’employeur de s’assurer que l’ensemble des éléments

L’employeur engage sa responsabilité contractuelle lorsqu’il ne respecte pas le régime dérogatoire convenu mais également lorsqu’il ne respecte pas l’obligation d’information au sens de l’art. 331 al. 4 CO.

Aux termes de cette disposition, l’employeur doit donner au travailleur les renseignements nécessaires sur ses droits envers une institution de prévoyance professionnelle ou en faveur du personne ou envers un assureur. Les renseignements doivent porter sur l’existence de toute police d’assurance contractée au bénéfice du travailler et sur tout rapport de prévoyance ainsi que sur les modalités de ces régimes d’assurances.

Résumé

A contrario d’une critique de plus en plus souvent formulée, le travailleur au bénéfice d’une assurance collective de perte de gain pour cause de maladie est mieux protégé en cas de maladie que par les dispositions légales en vigueur puisque la protection octroyée s’étend sur une période en tous points plus longue. Comme cela a toujours été le cas dans le cadre de la LAA, le collaborateur concerné touche, sans trop de restrictions, 80% de son salaire durant son incapacité de travail et son revenu régulier est en outre assuré, ce qui n’est par ailleurs subitement plus le cas dans le cadre des dispositions légales. L’allocation maternité et les allocations perte de gain sont d’ailleurs calquées sur ces dernières. Les parties demeurent dès lors libres de convenir de conditions plus favorables au travailleur.

Finalement et grâce à cette solution, le travailleur peut également faire valoir le salaire minimum concernant les absences pour d’autres raisons telles que maladie ou accident conformément au chiffre 1.

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