Titrisation: Actions et modification des statuts

Dans son arrêt 4A_39/2021 du 9 août 2021, le Tribunal fédéral s'est penché sur la question de savoir si les actions nominatives devaient être émises par la société sous forme de papier-valeur - c'est-à-dire au sens d'une titrisation - lorsque l'actionnaire le demande. Cette question n'est pas réglée dans l'actuel Code des obligations et la révision du droit de la société anonyme ne changera rien à cet égard (ATF 4A_39/2021 consid. 4.4).

03/06/2025 De: Beat Brändli
Titrisation

La question n'est pas tout à fait nouvelle : dans un arrêt de 1889 déjà, le Tribunal fédéral déclarait alors «qu'en règle générale, le souscripteur est en droit d'exiger que des actions physiques lui soient remises (contre paiement intégral) pour les droits liés aux actions qui lui reviennent» (ATF 15 I 619 consid. 3). Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le Tribunal fédéral a également dû se pencher sur l'annulation d'actions au porteur sur la base de documents détruits et a retenu que «la défenderesse [...] s'est acquittée de son obligation d'authentifier ces droits en établissant et en remettant aux demandeurs [...] les actions au porteur aujourd'hui détruites», sachant que les demandeurs n'auraient « droit à une nouvelle authentification» que «si ces actions étaient valablement annulées» (ATF 83 II 445 consid. 5).

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Ces deux formulations laissaient déjà présager que le Tribunal fédéral partait du principe qu'il existait un droit à la titrisation, alors que cette question est controversée dans la doctrine, où l'on peut distinguer deux orientations différentes : l'une suppose qu'il existe un droit légal à la titrisation sous forme de papier-valeur, mais que ce droit peut être écarté par les statuts, tandis que l'autre nie le droit (légal) à l'émission d'un papier-valeur, mais admet la possibilité que les statuts prévoient un droit en la matière (ATF 4A_39/2021 consid. 4.2).

Les doctrines ont en commun de partir du principe qu'il n'existe pas de droit impératif à la titrisation de la qualité de membre pour les actions nominatives, ce qui signifie que rien ne s'oppose à une réglementation statutaire (ATF 4A_39/2021 consid. 4.2.3).

Le Tribunal fédéral est resté fidèle à la voie empruntée dans les arrêts susmentionnés et a retenu que « les actionnaires ont donc un droit légal à ce que leurs droits sociaux soient représentés par un titre », étant entendu que « ce droit fondamental [...] peut être exclu dans les statuts, du moins pour les actions nominatives » (ATF 4A_39/2021 consid. 4.5).

Arrêt du Tribunal fédéral

Le Tribunal fédéral a conclu, en se référant aux statuts sur lesquels se fondait l'arrêt, qu'une disposition statutaire laissant à la société le choix d'émettre ou non des certificats à la place d'actions ne constituait pas une condition préalable au droit de l'actionnaire à la titrisation (ATF 4A_39/2021 consid. 5.1).

De nombreux statuts prévoient une formulation similaire à celle ayant fait l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral. Il est conseillé aux organes de la société d'envisager une révision des statuts et, le cas échéant, de procéder à une telle révision lors de la prochaine assemblée générale. Cette question ne se pose d'ailleurs que pour les sociétés anonymes, et non pour les sociétés à responsabilité limitée (Sàrl). La Sàrl est une société de capitaux à caractère personnel, s’opposant à la libre négociabilité des parts. Les associés n'ont, de ce fait, pas droit à la titrisation de leurs parts sociales.

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