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Présentéisme: Travailler lorsqu’on est malade

Le présentéisme, c’est le comportement qui consiste à travailler en dépit d’une incapacité de travail du point de vue médical. Le phénomène est largement répandu selon les identifications les plus récentes. Et ses conséquences économiques graves sont de plus en plus identifiées.

23/10/2019 De: Kurt Pärli
Présentéisme

Travailler lorsqu’on est malade porte atteinte à l’obligation de fidélité

À court terme, l’employeur et l’assuré économisent, avec le présentéisme, les frais de continuation de versement du salaire et les prestations des indemnités journalières. Mais, à moyen et à long terme, cela débouche sur des frais supérieurs, car les maladies en cours peuvent encore détériorer l’état de santé. En cas de maladie contagieuse, le risque s’étend aux autres collaborateurs. Cette thématique et les problèmes qui en découlent ont été relativement peu traités en droit, ce sont surtout les questions de la protection contre les licenciements et l’obligation de prévoyance et de fidélité qui ont bénéficié d’une attention soutenue.

Les délais de blocage sont applicables aussi en cas de présentéisme

Conformément à l’art. 336c al. 1 let. b CO, l’employeur ne peut pas, pendant une période de temps limitée, résilier les rapports de travail après l’expiration de la période d’essai si le collaborateur est en incapacité partielle ou totale de travail sans faute de sa part pour cause de maladie ou d’accident (ce que l’on appelle les délais de blocage qui est de 30 jours au cours de la première année de service, de 90 jours entre la seconde et la cinquième année de service et de 180 jours à partir de la sixième année de service). Si les collaborateurs travaillent quand même en dépit de leur maladie, la question qui se pose est de savoir s’ils peuvent se prévaloir de la protection dans le temps contre le licenciement. L’énoncé de la loi parle d’incapacité de travail du fait de maladie ou d’accident. Si l’on respecte mot à mot cet énoncé, les collaborateurs qui viennent travailler lorsqu’ils sont malades ne sont pas protégés contre le licenciement. Mais cette interprétation est toutefois réduite. Le but du délai de blocage est de faire en sorte que la recherche d’emploi ne soit pas influencée par la maladie. Selon la doctrine prédominante et la jurisprudence constante, les collaborateurs incapables de travailler ou partiellement en incapacité de travail et qui travaillent quand même sont fondamentalement protégés pendant le délai de blocage.

Les primes de présence sont interdites en termes de droit du travail.

Présentéisme, obligation d’assistance et droit de directive

Relève de l’obligation d’assistance de l’employeur, selon l’art. 328 CO, la protection de la personnalité et de la santé des employés. L’employeur doit, pour protéger la vie, la santé et l’intégrité personnelle de ses collaborateurs, prendre toutes les mesures nécessaires selon l’expérience, en fonction de l’état de la technique et appropriées aux circonstances de l’entreprise ou du ménage dans la mesure où cela peut être escompté raisonnablement de sa part selon les rapports individuels de travail et la nature de la prestation au travail. L’employeur doit donc prendre toute mesure considérée comme raisonnable afin de permettre la poursuite de l’occupation d’un collaborateur atteint dans sa santé, pour ne pas que son état de santé empire ou pour prévenir la survenance d’une atteinte à la santé.

L’obligation d’assistance de l’employeur entraîne, pour celui-ci, une obligation de faire en sorte que les collaborateurs ne travaillent pas en étant malades lorsqu’ils mettent ainsi leur propre santé ou celle de tiers en danger. Les employeurs peuvent ici s’en remettre au droit de directive ancré à l’art. 321d CO qui leur permet d’émettre des injonctions sur le comportement des employés dans l’entreprise et de leur donner des directives spécifiques. Par droit de directive, on entend en général une simple obligation, mais, si elle est nécessaire pour protéger les collaborateurs ou des tiers, elle devient une obligation qui découle du droit de donner des directives. Dans ce cas, les employeurs n’ont pas seulement le droit, mais aussi l’obligation de prévenir les collaborateurs de travaux qui seraient dangereux pour leur santé (la leur, mais aussi celle des autres). Il ne suffit pas ici, selon les circonstances, de renvoyer simplement les employés concernés chez eux. Car si le collaborateur peut effectuer le travail depuis chez lui, le travail en Home Office lui est interdit si et dans la mesure où cela est prescrit pour des raisons de santé.

Interdiction de présentéisme sur la base de l’obligation de fidélité des collaborateurs

Selon l’art. 321a CO, les employés ont l’obligation de préserver les intérêts légitimes de l’employeur en toute bonne foi. En fait partie, en cas d’incapacité de travail, le fait de contribuer à une guérison si possible rapide et à reprendre le travail immédiatement une fois la capacité (partielle) de travail récupérée. Étant donné que le présentéisme peut visiblement déboucher sur une prolongation d’une maladie ou la transformer en perturbation chronique, les collaborateurs n’ont pas seulement un droit, mais aussi, en considérant l’art. 321a CO, une obligation de ne pas travailler en cas d’incapacité de travail due à une maladie ou à un accident resp. de réduire l’activité, en accord avec le médecin traitant et l’employeur, aussi longtemps que l’état de santé l’oblige. Quiconque travaille ainsi en étant malade contrevient à son obligation de fidélité.

Primes de présence non autorisées

Du point de vue du droit du travail, les régimes selon lesquels les collaborateurs sont récompensés à l’aide de ce que l’on appelle des primes de présence pour ne pas être malades sont problématiques. L’objectif de tels instruments est de déplacer les visites chez le médecin pendant les heures de libre et de faire travailler le personnel en dépit d’inadéquations en termes de santé. Les primes à la présence visent objectivement à réduire les heures d’absences injustifiées et à récompenser le personnel qui se tient sans interruption à disposition de l’employeur. Il est clair que de telles primes de présence favorisent le présentéisme. On peut douter que de tels systèmes soient d’ailleurs dans l’intérêt de l’employeur. En outre, leur admissibilité est contestée sur le plan juridique.

Il n’existe, en droit du travail, aucun régime explicite relatif aux primes de présence. Mais les primes de présence sont absolument illégales dans la mesure où elles remplacent le droit de continuation de versement du salaire fixé par la loi selon l’art. 324a CO. Selon l’art. 322d CO, une gratification peut constituer une rétribution spécifique qui est versée en dehors du salaire ordinaire pour des événements particuliers. Et la loi de décrire notamment Noël ou la clôture de l’exercice social en tant qu’événements spécifiques. Même une prime de présence peut constituer une forme de gratification. Étant donné qu’une gratification est une prestation volontaire de l’employeur, il faut respecter le principe d’équité de traitement qui prévaut dans le droit du travail.

Celui-ci prescrit qu’un dénigrement arbitraire de certains collaborateurs par rapport à la majorité des autres est interdit. Un traitement inégalitaire du fait d’une maladie constitue une discrimination du fait d’une caractéristique spécifique du personnel et il doit donc être décrit comme immoral. C’est ce qu’a décidé le tribunal cantonal de Fribourg dans un cas datant de 2002. Une directive de l’entreprise prévoyait, pour les collaborateurs qui n’étaient pas malades pendant une année, un bonus de CHF 300.— alors que ceux qui étaient une ou plusieurs fois malades se voyaient infliger un malus. Le malus se composait d’une réduction de salaire de 1% - en fonction de la durée de l’absence pour maladie – pendant six à dix-huit mois. Le tribunal a considéré cette clause comme constituant une infraction aux bonnes mœurs et une atteinte à la personnalité et l’a ainsi annulée sur la base de l’art. 20 al. 2 CO. Les primes de présence sont douteuses en termes de microéconomie et elles sont interdites en droit du travail. Mais il n’existe pas encore de jurisprudence fédérale sur cette question.

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