Autoréflexion: Comprendre ses critères pour mieux agir

L'évaluation de la situation en tant que cadre commence par une autoréflexion sur soi-même et en étant honnête quant aux critères qui orientent ses propres actions et aux valeurs qui sont déterminantes pour la satisfaction individuelle.

22/11/2024 De: Matthias K. Hettl
Autoréflexion

Il est important de prioriser ses propres objectifs en fonction de leur importance et de leur échéance à court/moyen/long terme. Une planification de carrière devrait être orientée sur les différentes phases de la vie et les différents objectifs de carrière que l’on définit en fonction de ces dernières. Cela dépend de l'expérience professionnelle, de la routine croissante, mais aussi de la situation de vie personnelle. Dans le cadre d’une autoréflexion, on peut distinguer les phases suivantes:

  1. l'entrée dans la profession, la socialisation et la formation initiale et continue.
  2. la croissance avec l'expérience professionnelle qui grandit et la maturité ainsi que le développement possible de la direction.
  3. la maturité avec la prise en charge d'autres rôles en tant que mentor ou conseiller, la formation continue dans le domaine de travail concerné ou la réorientation possible et la rotation des postes.
  4. la saturation: évolution de carrière en tant que consultant senior, prise en charge de tâches de représentation, orientation croissante vers des projets et spécialisation.

Personal Balanced Scorecard et autoréflexion

Dans le contexte de l'entreprise, on dispose du tableau de bord prospectif développé par Kaplan et Norton, que l'on peut également utiliser ou modifier pour la planification de carrière personnelle (Personal Balanced Scorecard, PBSC) dans le cadre d’une autoréflexion. La BSC assure le transfert des stratégies en actions et se concentre sur les objectifs via la réalisation de chiffres clés. La BSC définit des objectifs stratégiques pour différentes perspectives, qui peuvent également être traduits dans le PBSC. La transformation des objectifs de l'entreprise en objectifs personnels est un point de départ important pour l'évaluation de la situation individuelle dans l’autoréflexion. Il faut, autrement dit, se mesurer à eux et se fixer des objectifs (partiels), s'évaluer en permanence et prendre des décisions quant à la poursuite de quelque chose, au changement d’orientation, voire même à l'abandon pur et simple. Notons que l'apprentissage à partir de phases d'échec ou même d'échec subjectivement ressenti ou objectivement attesté est un point positif pour l'apprentissage récurrent. En effet, les réorganisations individuelles occasionnelles, voire les réorientations font partie de l'apprentissage tout au long de la vie. L'échec ne débouche pas sur une défaite permanente si l'on sait analyser précisément les sources d'erreur et viser des améliorations, essayer d'autres voies.

Réussite professionnelle — 
le point de vue individuel

Une carrière n'est souvent pas un processus linéaire, mais plutôt, vu de l'extérieur, ce qui apparaît comme un succès professionnel. Or, ce succès doit toujours être vu sous deux angles: de l'extérieur, on peut considérer les étapes professionnelles, les changements de poste, les nouvelles acquisitions, le développement des collaborateurs, etc. Du point de vue individuel, le changement d'activité vers un emploi à temps partiel ou un congé sabbatique, ou encore un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée peuvent également être considérés comme des succès. Ces derniers dépendent donc de la formulation des objectifs individuels. Si l’on revient au tableau de bord prospectif, on tentera de répondre aux questions suivantes dans l cadre d’une autoréflexion:

  • Mission / Vision / Objectifs stratégique: Existe-t-il des objectifs supérieurs? Quelle est la motivation à la base de mon action? Est-ce que j'exclue d'agir pour certaines entreprises pour des raisons morales, politiques, etc. Pour des raisons politiques?
  • Perspective professionnelle: Est-ce que j'ai des modèles? Qui a façonné mon image professionnelle et est-ce que je possède de l'expérience dans le domaine professionnel visé? Lesquelles de mes compétences se recoupent avec des profils professionnels/de tâches appropriés?
  • Corps/ Santé: Quelle est l'importance que j'accorde à l'équilibre entre effort/stress et temps libre? Quelle est ma capacité de travail? Suis-je capable de travailler avec des défis temporels? Est-ce que je préfère certaines activités qui me demandent plus ou moins d'efforts physiques ou psychologiques?
  • Contact/Communication: Est-ce que j'aime communiquer avec un grand nombre de parties prenantes différentes? Ou est-ce que j'apprécie la simple communication personne à personne? Suis-je un homme de réseau ou un individu isolé? Est-ce que je me sens capable de convaincre les gens, quels que soient leur état, leur âge ou leur statut?
  • Finances: Quelle est l'importance d'un bon revenu? Est-ce que j'ai défini une limite inférieure qui me permet de vivre confortablement? Y a-t-il des dépendances/obligations dont je dois tenir compte? Dans quelle mesure suis-je prêt à prendre des risques (p. ex. par rapport à mon propre patrimoine)?
  • Perspective individuelle (spiritualité, créativité, etc.): Quelle est la liberté qui m'importe? Est-ce que je peux vivre mon individualité? Quelle est ma marge de manœuvre et qui la définit? Est-il important pour moi de pouvoir placer ma personnalité et mes convictions sur le plan professionnel? Quelle est ma capacité d'adaptation?

Il n'est pas facile de procéder à un état des lieux pour ainsi dire exhaustif et définitif. On procèdera donc de préférence à des autoréflexions multiples et répétés. Contrairement à une idée reçue, il n'existe pas de recette toute faite pour réussir sa carrière ou sa vie. On privilégiera donc plutôt un réexamen régulier de sa propre orientation. Le mieux est de demander périodiquement un feedback à ceux qui soutiennent votre parcours, mais aussi à ceux qui vous critiquent ou qui sont sceptiques, car leurs questions peuvent aussi vous conduire à des prises de conscience.

La méthode Harvard 

La méthode Harvard de Fisher et Ury peut vous être très utile: confrontez votre propre attitude à celle d'un partisan, d'un critique radical et d'un sceptique. Il est essentiel de différencier les thèmes factuels des thèmes personnels. Différentes méthodes de diagnostic d'aptitude offrent une entrée en matière judicieuse pour l'auto-réflexion. Connaître ses propres forces et faiblesses permet de trouver le cadre organisationnel approprié pour un travail satisfaisant. Ils ne sont pas seulement utilisés dans le cadre de la procédure de sélection pour un nouvel emploi, mais aussi de plus en plus pour vérifier régulièrement si le domaine d'activité correspond aux compétences existantes ou s’il faut envisager des soutiens spécifiques.

La pyramide des valeurs 

L’action s’oriente en fonction des valeurs individuelles, lesquelles ne sont pas déduites d'un besoin objectif, mais d'un questionnement honnête sur le propre projet de vie individuel. Seule la cohérence entre son propre système de valeurs et la culture d'entreprise concernée garantit la satisfaction et le succès dans la vie professionnelle. Qu'est-ce qui est important pour vous: les valeurs, le lieu, l'environnement privé/la phase de vie ou l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée? Souvent, les carrières sont orientées en fonction de facteurs externes, des conseils de la famille et des amis.

  1. Les compétences professionnelles constituent la base d'une carrière dans de nombreuses professions, mais la spécialisation est également importante pour les opportunités correspondantes.
  2. Les caractéristiques et représentations personnelles sont importantes pour la répartition souhaitée entre travail et loisirs, famille et profession, ainsi que pour le besoin de sécurité (matérielle et émotionnelle). Celui qui ne s'est jamais déplacé en dehors d'un rayon de 30 km environ peut être désarçonné par une relation pendulaire, en particulier s’il y a des enfants.
  3. Les carrières spécialisées ou de direction sont proposées dans de nombreuses entreprises et offrent des voies de carrière plus ou moins perméables, dans lesquelles on peut soi-même progresser. Pas toujours avec une grande marge de manœuvre, mais avec une spécialisation.
  4. Les conditions-cadres doivent être réfléchies et correspondre à la base de valeurs personnelle, au risque de connaître la frustration au quotidien.

Clarifier les motivateurs

La question à clarifier est toujours la suivante au niveau de l’autoréflexion: qu'est-ce qui me motive et qu'est-ce qui ne me motive pas? Quels sont les motifs et les motivateurs importants dans mon environnement? Il va de soi que les cadres doivent entraîner et atteindre leurs collaborateurs, car il s'agit de détecter la motivation (moteurs) et la démotivation dans la vie professionnelle. Les cadres devraient jouer un rôle de modèle et apporter ainsi un certain esprit à l'équipe, pouvoir présenter une vision. La théorie des deux facteurs de motivation de Frederick Herzberg est un bon exemple de motivation. Elle a également été largement prise en compte dans la pratique. Herzberg et son équipe se sont intéressés aux facteurs externes qui expliquent pourquoi une personne est motivée ou démotivée au travail. Ce changement de perspective a permis de mettre l'accent sur le vécu concret du travail.

Les facteurs d'hygiène, qui déclenchent l'insatisfaction, s'opposent aux motivateurs. Les premiers concernent surtout les conditions structurelles et organisationnelles, tandis que les seconds les aspects interpersonnels et communicatifs sur le lieu de travail. En ce qui concerne l'analyse de la motivation, il est utile de procéder à différentes auto-évaluations qui fournissent des informations sur les forces et les faiblesses personnelles. Vous pouvez par exemple utiliser pour ce faire les méthodes d'analyse Gallup Strength Finder, DISG ou INSIGHTS. Les compétences professionnelles ne sont pas les seules à être déterminantes pour une activité réussie, les compétences sociales le sont également. Il est donc fondamental, pour faire le point sur sa propre situation, de répondre aux besoins de sécurité, de transparence, de visibilité, de marge de manœuvre, de reconnaissance, etc. et de vérifier dans quelle mesure leur absence freine ou diminue ma performance ou ma volonté de travailler. Car pour pouvoir développer pleinement son potentiel, il faut une «entreprise adaptée», sinon on va dans le mur, selon la formule: love it, change it or leave it.

Newsletter S’abonner à W+