Actions nominatives: Papiers à ordre légaux

Aides de travail appropriées
Les actions nominatives sont des papiers à ordre légaux. Comme les détenteurs d'actions nominatives doivent être inscrits au registre des actions, leur nom est connu de la société. Les actions nominatives offrent à une société anonyme différentes possibilités d'organisation non envisageables avec des titres au porteur. La transmissibilité des actions nominatives peut être limitée (restriction de transfert) et des actions à droit de vote peuvent être introduites (actions avec droits de vote plus étendus). Il est également possible d'émettre des actions nominatives non entièrement libérées.
Les statuts peuvent prévoir que les actions nominatives peuvent être converties en actions au porteur, et les actions au porteur en actions nominatives (art. 622 al. 3 CO). En cas de conversion d'actions nominatives en actions au porteur, l'art. 622, al. 1bis CO doit toutefois être respecté.
Transfert d'actions nominatives
Sauf disposition contraire de la loi ou des statuts, les actions nominatives sont librement transmissibles (art. 684, al. 1 CO). Le transfert par acte juridique peut avoir lieu par la remise du titre endossé à l’acquéreur (art. 684, al. 2 CO). Au lieu d'être endossées, les actions peuvent faire l'objet d'une cession écrite. Lorsque des actions nominatives n'ont pas été émises, le transfert doit toujours se faire par cession.
Remarque: la libre transmissibilité de l'action nominative peut être limitée par la loi ou les statuts (art. 684, al. 1 CO a contrario, «restriction de transfert»).
Les actions nominatives qui ne sont pas intégralement libérées ne peuvent être transférées qu’avec l’approbation de la société, sauf s’il s’agit d’actions acquises par succession, partage successoral, en vertu du régime matrimonial ou dans une procédure d’exécution forcée (art. 685, al. 1 CO). La société ne peut refuser son approbation que si la solvabilité de l’acquéreur est douteuse et que les sûretés exigées par la société n’ont pas été fournies (art. 685, al. 2 CO).
Les statuts peuvent prescrire que le transfert des actions nominatives est subordonné à l’approbation de la société (art. 685a, al. 1 CO). Cette restriction vaut aussi pour la constitution d’un usufruit (art. 685a, al. 2 CO). Si la société entre en liquidation, les restrictions de la transmissibilité tombent (art. 685a, al. 3 CO). Sous réserve d'une disposition statutaire contraire, le conseil d'administration est compétent pour décider de la reconnaissance d'un actionnaire. Il est admis que cette compétence soit réservée à l'assemblée générale dans les statuts.
Remarque: les restrictions de transfert statutaires permises diffèrent selon qu'il s'agit d'actions nominatives cotées ou non cotées en bourse.
En cas d’actions nominatives non cotées en bourse, la société peut refuser son approbation en invoquant un juste motif prévu par les statuts ou en offrant à l’aliénateur de reprendre les actions pour son propre compte, pour le compte d’autres actionnaires ou pour celui de tiers, à leur valeur réelle au moment de la requête (art. 685b al. 1 CO). Sont considérées comme de justes motifs les dispositions concernant la composition du cercle des actionnaires qui justifient un refus eu égard au but social ou à l’indépendance économique de l’entreprise (art. 685b, al. 2 CO). Les justes motifs doivent être expressément mentionnés et décrits dans les statuts. Un simple renvoi à l'art. 685b, al. 2 CO ne suffit pas.
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Exemple de disposition statutaire : «La société a pour but la publication d'un mensuel qui s'inspire des valeurs fondamentales de l'Eglise catholique romaine. Restriction de transfert : le transfert des actions est soumis à l'approbation du conseil d'administration. L'approbation n'est accordée que si l'acquéreur des actions appartient à l'Eglise catholique romaine. L'approbation peut en outre être refusée pour les motifs prévus par la loi.»
Comme il ne sera pas possible de prévoir des motifs de refus suffisamment concrets pour couvrir tous les cas d'acquéreurs d'actions indésirables, le législateur a créé, en complément du refus pour justes motifs décrits dans les statuts, la possibilité, à l'art. 685b, al. 1 CO, de refuser un acquéreur sans indiquer de motifs si la reprise des actions est proposée à leur valeur réelle («clause échappatoire»).
L'offre de reprise doit porter sur la totalité des actions et non sur une partie seulement. Elle peut être faite pour le compte propre de la société, pour le compte d'autres actionnaires ou pour le compte de tiers. L'acquisition des actions par la société n'est toutefois autorisée que dans les limites de l'art. 659, al. 2 CO, c'est-à-dire que la société peut acquérir jusqu'à 20 % de ses propres actions au maximum et qu'elle doit disposer de suffisamment de fonds propres librement utilisables pour l'acquisition.
La valeur réelle de l'action n'est pas définie plus précisément dans la loi.
Selon la doctrine actuelle, à laquelle le Tribunal fédéral s'est rallié à plusieurs reprises, la valeur réelle se détermine comme la valeur totale de la société sur la base de la valeur substantielle et de la valeur de rendement (ATF 120 II 252, 259). En cas de désaccord, l’acquéreur peut demander que le tribunal du siège de la société détermine la valeur réelle. La société supporte les frais d’évaluation (art. 685b, al. 5 CO). Si l’acquéreur ne rejette pas l’offre de reprise dans le délai d’un mois après qu’il a eu connaissance de la valeur réelle, l’offre est réputée acceptée (art. 685b, al. 6 CO).
La société peut en outre refuser l’inscription au registre des actions si l’acquéreur n’a pas expressément déclaré qu’il reprenait les actions en son propre nom et pour son propre compte (art. 685b, al. 3 CO).
Si les actions ont été acquises par succession, partage successoral, en vertu du régime matrimonial ou dans une procédure d’exécution forcée, la société ne peut refuser son approbation que si elle offre à l’acquéreur de reprendre les actions en cause à leur valeur réelle (art. 685b, al. 4 CO).
Tant que l’approbation nécessaire au transfert des actions n’est pas donnée, la propriété des actions et tous les droits en découlant restent à l’aliénateur (art. 685c, al. 1 CO).
En cas d’acquisition d’actions par succession, partage successoral, en vertu du régime matrimonial ou dans une procédure d’exécution forcée, la propriété du titre et les droits patrimoniaux passent immédiatement à l’acquéreur, les droits sociaux, seulement au moment de l’approbation par la société (art. 685c, al. 2 CO). L’approbation est réputée accordée si la société ne la refuse pas dans les trois mois qui suivent la réception de la requête ou rejette celle-ci à tort (art. 685c, al. 3 CO).
Pour les actions nominatives cotées en bourse, la loi prévoit les motifs de refus suivants:
- la société ne peut refuser comme actionnaire l’acquéreur d’actions nominatives cotées en bourse que si les statuts prévoient une limite en pour-cent des actions nominatives jusqu’à laquelle un acquéreur doit être reconnu comme actionnaire, et que cette limite est dépassée (art. 685d, al. 1 CO);
- la société peut en outre refuser un acquéreur lorsque, malgré sa demande, celui-ci n’a pas déclaré expressément qu’il a acquis les actions en son propre nom et pour son propre compte, qu’aucun contrat sur la reprise ou la restitution desdites actions n’a été conclu et qu’il supporte le risque économique lié aux actions. Elle ne peut pas refuser l’inscription au seul motif que la demande a été déposée par la banque de l’acquéreur (art. 685d, al. 2 CO);
en complément de l'art. 685d, al. 1 et 2 CO, la société peut, sur la base d'une disposition statutaire, refuser des personnes comme acquéreurs d'actions nominatives cotées en bourse, dans la mesure et aussi longtemps que leur reconnaissance pourrait empêcher la société de fournir les preuves exigées par les lois fédérales concernant la composition du cercle des actionnaires (art. 4, Dispositions finales du Titre vingt-sixième du CO).
Remarque: par «cotée en bourse», on entend l'admission d'actions nominatives d'une SA ayant son siège en Suisse au négoce sur un marché réglementé sur la base d'une procédure d'admission particulière. Les actions nominatives qui ne sont négociées que hors bourse ne sont pas considérées comme cotées en bourse.
Si des actions nominatives cotées en bourse ont été acquises par succession, partage successoral ou en vertu du régime matrimonial, l’acquéreur ne peut pas être refusé comme actionnaire (art. 685d, al. 3 CO).
Il existe aussi une obligation d’annoncer: si des actions nominatives cotées en bourse sont vendues en bourse, la banque de l’aliénateur annonce immédiatement à la société le nom du vendeur et le nombre d’actions vendues (art. 685e CO).
Si des actions nominatives cotées en bourse sont acquises en bourse, les droits passent à l’acquéreur du fait de leur transfert. Si des actions nominatives cotées en bourse sont acquises hors bourse, les droits passent à l’acquéreur dès que celui-ci a déposé auprès de la société une demande de reconnaissance comme actionnaire (art. 685f, al. 1 CO). Jusqu’à cette reconnaissance, l’acquéreur ne peut exercer ni le droit de vote qui découle de l’action ni les autres droits attachés au droit de vote. L’acquéreur n’est pas restreint dans l’exercice de tous les autres droits, en particulier du droit de souscription préférentiel (art. 685f, al. 2 CO). Les acquéreurs non encore reconnus par la société sont, après le transfert du droit, inscrits au registre des actions comme actionnaires sans droit de vote. Leurs actions ne sont pas représentées à l’assemblée générale (art. 685f, al. 3 CO). En cas de refus illicite de l’acquéreur, la société est tenue de reconnaître son droit de vote ainsi que les droits attachés au droit de vote à partir du jour du jugement; elle est en outre tenue de réparer le dommage que l’acquéreur a subi du fait de son refus à moins qu’elle ne prouve qu’aucune faute ne lui est imputable (art. 685f, al. 4 CO).
Si la société ne refuse pas la reconnaissance de l’acquéreur dans les 20 jours, celui-ci est réputé reconnu comme actionnaire (art. 685g CO).
Registre des actions
La société tient un registre des actions, qui mentionne le nom et l’adresse des propriétaires et des usufruitiers d’actions nominatives. Elle tient ce registre de manière à ce qu’il soit possible d’y accéder en tout temps en Suisse (art. 686, al. 1 CO). Le registre des actions n'a qu'une valeur interne à la société, les inscriptions ne bénéficient pas de la foi publique. Cela signifie que les tiers ne peuvent pas se fier à l'exactitude du registre des actions. En outre, il sert d'aperçu des actionnaires nominatifs, notamment pour prouver la domination suisse d'une société anonyme, ainsi que de répertoire d'adresses.
L’inscription au registre des actions n’a lieu qu’au vu d’une pièce établissant l’acquisition du titre en propriété ou la constitution d’un usufruit (art. 686, al. 2 CO). La société est tenue de porter cette mention sur le titre (art. 686, al. 3 CO). Est considéré comme actionnaire ou usufruitier à l’égard de la société celui qui est inscrit au registre des actions (art. 686, al. 4 CO). Cette disposition est adaptée au cas normal où le registre des actions est dûment tenu. Dans ce cas, l'inscription permet de conclure que la personne inscrite s'est dûment identifiée et que la société a approuvé (si nécessaire) le transfert des actions en sa faveur et que personne d'autre ne l'a remplacé depuis lors. Cette conclusion n'est toutefois pas irréfutable. L'inscription dans un registre des actions généralement tenu de manière régulière ne constitue qu'une présomption qui tombe s'il est démontré que la personne en question a été inscrite en violation de l'art. 685, al. 2 CO ou que, depuis lors, un successeur juridique de cette personne a présenté la pièce d'identité requise par cette disposition et a été accepté (si nécessaire) par la société comme nouvel actionnaire. Dans ses relations avec les actionnaires, la société ne peut s'en tenir qu'à une inscription qui ne peut faire l'objet d'une telle objection (ATF 90 II 164 consid. 3 ; ATF 124 III 350 consid. 2c ; 4A_251/2023 consid. 7.2).
La société peut, après avoir entendu la personne concernée, biffer les inscriptions au registre des actions lorsque celles-ci ont été faites sur la base d’informations fausses données par l’acquéreur. Celui-ci doit en être immédiatement informé (art. 686a CO).
Actions nominatives non entièrement libérées
L’acquéreur d’une action nominative qui n’est pas intégralement libéré répond des versements à l’égard de la société dès qu’il est inscrit sur le registre des actions (art. 687, al. 1 CO). Lorsque le souscripteur aliène son action, il peut être recherché pour le montant non versé si la société est déclarée en faillite dans les deux ans qui suivent son inscription sur le registre du commerce et si l’ayant cause a été déclaré déchu de ses droits d’actionnaire (art. 687, al. 2 CO). L’aliénateur qui n’est pas souscripteur est, dès l’inscription de l’acquéreur sur le registre des actions, délié de l’obligation de faire des versements (art. 687, al. 3 CO). Tant que des actions nominatives ne sont pas libérées à concurrence de leur valeur nominale, le montant versé doit être indiqué sur le titre (art. 687, al. 4 CO).