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Contrat individuel de travail: Critère de subordination et délimitation par rapports aux autres contrats

A teneur de l’art. 319 al. 1 CO, par le contrat individuel de travail, le travailleur s’engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l’employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d’après le temps ou le travail fourni.

03/02/2022 De: Philippe Ehrenström
Contrat individuel de travail

Contrat de travail et lien de subordination

Le lien de subordination constitue le critère distinctif essentiel du contrat de travail. Le travailleur est placé dans la dépendance de l’employeur sous l’angle personnel, fonctionnel, temporel, et dans une certaine mesure économique. Le travailleur est assujetti à la surveillance, aux ordres et instructions de l’employeur; il est intégré dans l’organisation de travail d’autrui et y reçoit une place déterminée.

Fonctions dirigeantes et professions libérales

Il est des situations où le critère de subordination apparaît à peu près inopérant. C’est le cas des fonctions dirigeantes et des professions libérales, qui agissent avec beaucoup d’indépendance tout en étant pourvues de responsabilités.

Pour qualifier le contrat de travail, le critère de la subordination doit donc être relativisé en ce qui concerne ces personnes. L’indépendance de l’employé est alors beaucoup plus grande et la subordination s’avère essentiellement organisationnelle. Elle se rapproche ici du critère de l’intégration.

Dans de tels cas, plaident notamment en faveur du contrat de travail la rémunération fixe ou périodique, la mise à disposition d’une place de travail et des outils de travail, ainsi que la prise en charge par l’employeur du risque de l’entreprise. Le travailleur renonce en effet à participer au marché comme entrepreneur assumant le risque économique et abandonne à un tiers l’exploitation de sa prestation, en contrepartie d’un revenu assuré.

D’autres indices peuvent également militer en faveur du contrat de travail : il s’agit du prélèvement de cotisations sociales sur la rémunération due ou la qualification d’activité lucrative dépendante par les autorités fiscales ou les assurances sociales. Ces indices, il faut le relever, n’ont souvent qu’une importance secondaire dans la jurisprudence.

Agent ou voyageur de commerce

Il est des titres et activités dont la délimitation n’apparait pas toujours évidente a priori. C’est le cas du voyageur de commerce et de l’agent, dont les qualifications juridiques respectives permettront de mieux apprécier, concrètement, le critère de subordination du contrat de travail.

Le critère essentiel de distinction entre le contrat d’engagement des voyageurs de commerce (art. 347 ss CO), qui est un contrat individuel de travail à caractère spécial, et le contrat d’agence (art. 418a ss CO), réside dans le fait que l’agent exerce sa profession à titre indépendant, tandis que le voyageur de commerce se trouve dans un rapport juridique de subordination à l’égard de son employeur.

L’agent, contrairement au voyageur de commerce, peut organiser son travail comme il l’entend, disposer de son temps à sa guise et n’est pas lié par les instructions et directives de son cocontractant. A l’inverse, le fait de devoir visiter un certain nombre de clients, d’avoir à justifier un chiffre d’affaires minimum ou l’obligation d’adresser des rapports périodiques sont des indices permettant d’inférer l’existence d’un contrat d’engagement des voyageurs de commerce (contrat de travail).

L’appréciation doit se faire de cas en cas, en tenant compte de l’ensemble des circonstances.

Dans un ATF 4A.533/2012, le Tribunal fédéral a ainsi procédé à un examen détaillé des éléments de fait particuliers qui permettaient de retenir telle qualification plutôt que telle autre.

L’accord conclu entre les parties avait été intitulé « Agenturvertrag », ce qui semblait exclure la qualification du contrat de travail. Mais les termes et dénominations choisis par les parties pour qualifier leurs relations ne sont pas déterminants.

Poursuivant son examen, le Tribunal fédéral a relevé que le recourant, affecté au service externe de l’intimée, ne devait respecter les instructions de l’intimée qu’en ce qui concernait la gamme des produits financiers offerts aux clients. Il pouvait par ailleurs exercer son activité où il l’entendait, en Suisse et au Liechtenstein. Il n’avait aucun horaire à respecter et décidait librement de prendre ou non des jours de repos. Il ne lui était pas interdit de travailler pour d’autres mandants, pour autant que ces derniers soient liés conventionnellement à l’autre partie.

Le recourant s’est également toujours comporté en indépendant. Il n’a jamais effectué des travaux purement administratifs dans l’unique intérêt de l’intimée. Il a été inscrit au registre du commerce et s’acquittait lui-même des cotisations aux assurances sociales. De plus, il a souscrit personnellement une assurance couvrant le risque de perte de gain en cas de maladie et accidents. En outre, il a déduit de son revenu imposable l’ensemble des dépenses en relation avec son activité professionnelle, sans se limiter aux frais professionnels nécessaires à l’exercice de l’activité dépendante (cf. art. 9 al. 1 LHID ; art. 26 al. 1 let. a à c LIFD).

L’ensemble de ces éléments, pris globalement, amène  à nier tout rapport de subordination entre les parties et à admettre l’indépendance du recourant par rapport à sa partie adverse. Les plaideurs ont donc été liés par un contrat d’agence au sens de l’art. 418a CO et non par un contrat de travail.

Contrat de travail ou société simple

Dans les petites structures, il est fréquent que le départ de l’activité prenne place sans que l’on se préoccupe beaucoup de savoir qui est salarié et qui est associé dans un projet commun, et sans que l’on définisse très précisément la position de chacun. La situation change évidemment en cas de conflit ultérieur : si l’entreprise est un succès, l’employé s’en voudra associé ; si elle est un échec, il se préférera salarié. Comment trancher ?

La société simple est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d’unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d’atteindre un but commun et qui ne présente pas les caractères distinctifs d’une autre société prévue par la loi (art. 530 CO).

L’animus societatis, qui est l’un des éléments caractéristiques de ce contrat, suppose la volonté de mettre en commun des biens, ressources ou activités en vue d’atteindre un objectif déterminé, d’exercer une influence sur les décisions et de partager non seulement les risques et les profits, mais surtout la substance même de l’entreprise.

C’est donc avant tout la position des parties qui permet de distinguer le contrat de travail de la société simple.

Alors que le travailleur se trouve dans un rapport de subordination avec l’employeur et n’a pas d’influence et/ou de droit de contrôle étendu sur la marche des affaires, les associés sont par contre sur pied d’égalité. L’associé n’a pas de rémunération périodique et supporte le risque de l’entreprise, contrairement à l’employé.

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