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Le solde de vacances: La prise des vacances durant le délai de congé

Il est fréquent qu’à la résiliation des rapports de travail le collaborateur soit au bénéfice d’un solde de vacances positif. Selon les circonstances, l’employeur ne peut pas imposer la prise de celles-ci durant le délai de préavis. Lumière sur une problématique complexe.

07/03/2022 De: Christine Sattiva Spring
Le solde de vacances

Quel sera l’impact de la résiliation du contrat sur le solde de vacances?

A teneur de l’art. 329d al. 2 CO, tant que durent les rapports de travail, les vacances ne peuvent pas être remplacées par des prestations en argent ou d’autres avantages.

Cependant, la jurisprudence admet que des prestations en argent remplacent les vacances lorsque l’employé n’a pas eu la possibilité de les prendre avant la fin des rapports de travail ou lorsqu’on ne peut exiger qu’elles soient effectivement prises[1].

Dans l’hypothèse inverse, il peut arriver, lorsque le contrat de travail est résilié en cours d’année de service, que le collaborateur ait eu trop de vacances par rapport à son quota annuel. Rien n’est spécifiquement prévu dans la loi dans ce cas de figure et il convient de faire application des règles générales. Ainsi, les vacances étant une contrepartie à l’exécution du travail et constituant un élément de la rémunération contractuelle, elles devraient faire l’objet d’une conversion en argent et d’un éventuel remboursement dans le cadre du décompte final.

On distinguera cependant deux situations, selon que les vacances excédentaires ont été accordées à la demande du travailleur ou qu’elles ont été imposées par l’employeur. Dans le premier cas, il n’est pas possible de partir de l’idée que l’employeur a d’emblée accepté d’offrir une prestation supplémentaire au collaborateur si les rapports de travail devaient prendre fin en cours d’année de service. En effet, le droit aux vacances sera définitif uniquement lorsque le collaborateur aura fourni sa prestation de travail y donnant droit[2].

En revanche, lorsqu’il s’agit de vacances imposées par l’employeur[3], ce dernier ne peut réclamer le remboursement du salaire afférant aux vacances sauf si une telle obligation est prévue entre les parties[4]. Nous ne saurions dès lors trop recommander aux employeurs d’adopter des clauses claires à ce propos dans leur règlement d’entreprise par exemple et d’attirer l’attention des collaborateurs sur cette obligation, qui pourrait toutefois être jugée excessive lorsque l’employeur résilie le contrat sans motif justifié ou que le collaborateur dispose de son côté d’un motif justifié de quitter l’entreprise.

Dans la situation où les rapports de travail ont pris fin suite à un licenciement avec effet immédiat, le droit au paiement des vacances est en principe compris dans la prétention déduite de l’art. 337c al. 1 CO[5].

Cela étant, le Tribunal fédéral a précisé que si ce droit est en tout cas reconnu au travailleur renvoyé abruptement alors que le contrat aurait normalement dû prendre fin dans un délai relativement bref, estimé à deux ou trois mois, il n'en va pas de même lorsque l'employé est indemnisé pour une longue période au cours de laquelle il ne travaille pas. Dans ce dernier cas, l'indemnité allouée inclut le droit aux vacances[6]. L’employeur devrait toutefois pouvoir se prévaloir de l’absence de travail pendant la période équivalente au délai de congé, come en cas de libération de l’obligation de travailler.

Quel impact sur le droit aux vacances lorsque le travailleur est libéré de son obligation de travailler?

Dans le cadre d’un licenciement ordinaire, le travailleur est de plus en plus souvent libéré de son obligation de travailler entre le moment où il reçoit son congé et la fin effective des rapports de travail intervenant à l’échéance du délai de congé. Dans ce cas, le collaborateur bénéficie pleinement de son temps et il convient d’examiner si son droit aux vacances restant doit être indemnisé ou si l’employeur peut partir du principe que ce solde est compensé par la libération de l’obligation de travailler.

Le point de savoir si le solde de vacances non prises doit être indemnisé en espèces repose sur le rapport entre la durée de la libération de l’obligation de travailler et le nombre de jours de vacances restant[7].

Même libéré de son obligation de travailler, le collaborateur doit bénéficier de suffisamment de temps pour retrouver un nouvel emploi, en sus des vacances à prendre. S’il n’est pas aisé d’établir une corrélation précise entre le temps que le travailleur doit avoir à sa disposition pour retrouver un nouvel emploi et les jours de vacances qui peuvent être compensés par la libération de l’obligation de travailler, il faut néanmoins faire une appréciation globale des circonstances du cas d’espèce, en gardant à l’esprit que, plus le délai de congé est court, moins importante sera la compensation. Nous sommes toutefois d’avis qu’il faut tenir compte tant du domaine d’activité que des particularités propres au collaborateur, en particulier de son âge et de son expérience, en gardant à l’esprit que le travailleur licencié mais non libéré de son obligation de travailler doit pouvoir bénéficier d’un demi-jour de congé par semaine en lien avec l’organisation de ses recherches d’emploi. La jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle le devoir de fidélité du travailleur lui impose de prendre ses vacances durant la période de libération, même sans instruction de la part de l’employeur à ce sujet[8], va dans le même sens.

La solution sera toutefois différente lorsque le travailleur est libéré de son obligation de travailler mais que l’employeur exige qu’il reste disponible par téléphone ou par courrier électronique pour la reprise du flambeau par son successeur sans en limiter clairement l’étendue. Cette obligation influe sur la faculté du travailleur de prendre et d’organiser effectivement ses vacances en nature. Dans pareilles situations, le collaborateur doit pouvoir obtenir le paiement d’une indemnité pour les vacances non prises[9], le cas où l’employeur parvient à établir la prise de vacances effective étant réservé.

Sans être toujours dépourvue d’équivoque, la jurisprudence a admis la compensation de cinq jours de vacances dans une durée de libération de travailler de vingt jours[10] et de quinze jours sur une période de trois mois[11]. S’agissant du rapport entre les jours de vacances restant et la durée totale de libération de travailler, le Tribunal fédéral a retenu comme suffisant des pourcentages de 25, 30 ou même 45%[12].

[1] TF, 4A_434/2014 du 27 mars 2015, consid. 4.2.

[2] CEROTTINI, Commentaire de l’art. 329d CO, N 31, in DUNAND/MAHON (éditeurs), Commentaire du contrat de travail, Stämpfli, Berne, 2013.

[3]  On pense avant tout à la fermeture annuelle de certaines entreprises ou aux vacances forcées pour raisons économiques notamment.

[4] CEROTTINI, Commentaire de l’art. 329d CO, N 31 in DUNAND/MAHON (éditeurs), Commentaire du contrat de travail, Stämpfli, Berne, 2013.

[5] TF, 4C.293/2004 du 15 juillet 2005, consid. 5.

[6] TF, 4C.293/2004 du 15 juillet 2005, consid. 5.

[7] TF, 4A_434/2014 du 27 mars 2015, consid. 4.2.

[8] ATF 128 III 271, consid. 4 et CEROTTINI, Commentaire de l’art. 329d CO, N 26, in DUNAND/MAHON (éditeurs), Commentaire du contrat de travail, Stämpfli, Berne, 2013.

[9] TF, 4A_117/2007 du 13 septembre 2007, consid. 6.2 et 6.3.

[10] TF, 4C.193/2005 du 30 septembre 2005, consid. 3.2.

[11] TF, 4C.215/2005 du 20 décembre 2005, consid. 6.3.

[12] CEROTTINI, Commentaire de l’art. 329d CO, N 26, in DUNAND/MAHON (éditeurs), Commentaire du contrat de travail, Stämpfli, Berne, 2013.

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