Contrats en chaîne: Faites le point!

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Définition des contrats en chaîne
La jurisprudence et la doctrine qualifient de contrats en chaîne la succession de plusieurs contrats à durée déterminée ayant un contenu similaire. Si cette pratique permet de contourner des normes protectrices, elle peut être illicite. En effet, contrairement aux collaborateurs sous contrat à durée déterminée, ceux en contrat à durée indéterminée bénéficient avec l’ancienneté de délais de résiliation prolongés (art. 335c al. 2 CO) et d’une meilleure protection contre les congés en temps inopportun (art. 336c al. 1 let. b CO). Par ailleurs, seuls les contrats de plus de trois mois ouvrent le droit à la prévoyance professionnelle (art. 1j al. 1 let. b OPP 2, interprétation a contrario). En conséquence, l’enchaînement de contrats courts peut limiter la couverture LPP des collaborateurs.
Face à ce risque de contournement, seuls des motifs objectifs permettent de justifier les contrats en chaîne. À défaut, on peut invoquer une violation de l’interdiction de l’abus de droit (art. 2 al. 2 CC). Ces motifs ne sont pas définis dans la loi et la jurisprudence ne fournit pas encore de critères clairs. Il est seulement admis que la simple répétition d’un contrat ne prouve pas forcément une volonté frauduleuse de l’employeur.
Motifs objectifs justifiant les contrats en chaîne
Chaque cas de contrats en chaîne doit être analysé individuellement, en tenant compte notamment de la durée des engagements successifs, des raisons et durées des interruptions, ainsi que de l’identité de l’employeur. Le Tribunal fédéral a jugé qu’un renouvellement unique est en principe admissible, mais le nombre de renouvellements n’est pas déterminant à lui seul (ATF 124 III 469). Cette position a été critiquée car chaque situation mérite une appréciation globale. Un renouvellement unique peut être abusif, tout comme plusieurs peuvent être justifiés s’ils répondent à des raisons objectives.
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Parmi les justifications reconnues figurent par exemple la prise d’une nouvelle fonction dans l’entreprise ou le besoin de renouvellement du public d’un théâtre, ce qui justifie l’engagement temporaire d’un chanteur pour une nouvelle saison. Peuvent aussi être admises des spécificités du poste ou la situation économique de l’entreprise. Pour les enseignants engagés par semestre ou par année scolaire, le Tribunal fédéral a admis qu’il pouvait exister des motifs objectifs, mais qu’ils doivent être vérifiés au cas par cas. Dans une affaire où un enseignant avait enchaîné des contrats pendant 14 ans, le Tribunal a constaté une relation de travail stable sans justification valable.
Il arrive aussi que le souhait de renouvellement émane du salarié ; les contrats en chaîne reposent alors sur des motifs subjectifs et ne sont pas abusifs.
Conséquences juridiques des contrats en chaîne illicites
En l’absence de motifs objectifs valables, les contrats en chaîne sont requalifiés en contrat à durée indéterminée. La durée totale des engagements est alors prise en compte pour l’ancienneté. Les dispositions légales écartées — comme les délais de résiliation ou la protection contre les congés abusifs (art. 336 CO) ou en temps inopportun (art. 336c CO) — s’appliquent rétroactivement, sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’intention frauduleuse de l’employeur.
Les autres clauses du contrat restent applicables. Par exemple, si le contrat excluait une résiliation anticipée, celle-ci demeure impossible avant le terme initialement prévu, sous réserve du délai de résiliation. Autrement dit, un contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée avec durée minimale. Les effets liés à l’ancienneté (salaire en cas de maladie, indemnité de départ, etc.) s’apprécient sur l’ensemble des contrats, qu’ils aient été justifiés ou non.
En résumé, les clauses des contrats en chaîne restent valides même sans justification objective, mais les protections légales éludées s’appliquent rétroactivement.