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Avenir du travail: 9 thèses sur le monde du travail de demain

La manière dont nous travaillerons à l'avenir dépendra de trois facteurs clés, à savoir de l'évolution de l'environnement et de l'économie, de l'évolution du rapport au travail du point de vue des collaborateurs et, enfin, des besoins de l'économie. Des changements importants sont en cours dans ces trois domaines. S’ils s’accompagnent inévitablement d’incertitudes, ces changements nous donnent aussi l’occasion d’imaginer comment nous travaillerons à l'avenir. C'est l'objet de cet article.

09/01/2024 De: Christoph Jordi
Avenir du travail

Facteur d’influence 1: Economie et environnement

Pour bien penser le futur, il faut tenir compte de trois paramètres essentiels. Il y a tout d’abord le changement géopolitique. Les grandes nations – d’un point de vue économique - de ces dernières décennies, comme les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Angleterre et la France, vont perdre peu à peu de leur importance par rapport à l'Asie. Si l'évolution démographique y est certainement pour quelque chose, les systèmes de formation et le simple pouvoir du marché y ont également leur part. Le deuxième grand facteur environnemental est l'intelligence artificielle, qui entraînera de grands bouleversements dans l'économie. Savoir utiliser cette force à bon escient sera la garantie du succès. Le troisième facteur est indubitablement le changement climatique. Celui-ci aura un impact considérable sur de nombreux secteurs industriels, comme le tourisme.

Facteur d’influence 2: Collaborateurs

Le travail en tant que partie essentielle de l’existence perd de son importance, surtout chez les jeunes générations. Si le travail définissait largement la vie de nos grands-mères et grands-pères, tel n’est plus le cas aujourd'hui, où d’autres valeurs prévalent. La question du sens ou l'organisation globale de la vie sont en effet plus importantes qu’une carrière menée tambour battant ou le prestige d’occuper une position clé au sein d’une entreprise.

La valeur du travail évolue considérablement. Dans les nations économiquement très développées avec un niveau de formation élevé, les collaborateurs veulent davantage que gagner de l'argent et assurer leur subsistance. Ils entendent en effet trouver de nouvelles possibilités de s’organiser et de se développer. On comprend dès lors que la loyauté envers l'employeur se délite quelque peu. L'employeur est en fait perçu  comme une plateforme pour se réaliser. Les collaborateurs attendent donc un degré élevé de personnalisation et de possibilité d'aménagement de leurs propres conditions de travail. L'évolution démographique et le manque de personnel qualifié qui en découle accentuent encore ces tendances.

Facteur d’influence 3: Entreprises

Les entreprises se trouvent aujourd'hui à la croisée des chemins: après avoir mis la priorité sur la production, priorité à la conception. La production industrielle est largement automatisée. L'ère de l’intelligence artificielle remplace peu à peu l’ère de l'Internet. On sollicite donc toutes les capacités en mesure de contrôler, de remettre en question ou de surpasser l'intelligence artificielle. Voilà le nouveau grand espace qui s’ouvre après l'introduction du World Wide Web. Un espace qui ouvre une foule de possibilités, dont notamment le retour à des activités artisanales. Qu'il s'agisse de cuisiniers, de menuisiers ou de mécaniciens, des niches et des champs d’activités s'ouvriront ici, que l'IA ne pourra que difficilement occuper. Car il faut en effet de l'émotion, de l'imagination et de la créativité. A cela s'ajoute une clientèle qui sait aussi apprécier de type de prestations, car elle en a assez des produits fabriqués par des robots industriels.

Si elles entendent rester dans la course, les entreprises doivent être plus dynamique. Le maître mot ici est développement organisationnel. Les organisations doivent en effet pouvoir mettre à disposition les bons talents au bon moment et au bon endroit. Et ce n’est pas avec des hiérarchies rigides, une mentalité de jardinier et des descriptions de processus interminables que l’on va y parvenir. Les entreprises qui réussissent à garder leurs compétences aussi souples que possible ont un avantage. Mais pour ce faire il faut de nouvelles formes d'organisation et de nouveaux rôles. Il faut de nouvelles formes de collaboration. Il faut des réseaux et des systèmes flexibles.

Ces trois facteurs principaux permettent de dégager des thèses passionnantes pour l'avenir du travail.

Thèse 1: Qui dit marché du travail dit révolution du recrutement

Nous voici donc sur le marché du travail. Pas facile. Nous nous réjouissons de chaque candidature, comme si c’était un but marqué en Ligue des champions. Nous y voici déjà. Surtout ne pas rater l'entretien! Auquel cas notre candidat partira aussi vite qu’il est venu. Nous sommes aux taquets! Et nous n'entendrons plus parler de notre candidat préféré. En d'autres termes, le recrutement, c’est du passé. Place à la vente et au marketing. On remplace les offres d'emploi par des offres de développement. Les événements de vente et de réseautage sont à la mode. On s’adonne au community management dans les différents groupes cibles. D’abord la tête d’affiche, le CEO qui intervient pour les offres de participation dans l'entreprise. C’est qu’il faut faire de la publicité active pour gagner de nouveaux membres. Changer de mentalité, penser différemment.

Impossible d’y échapper. Mais nous sommes encore coincés dans les plateformes de nos fournisseurs, qui nous prescrivent combien de caractères nous pouvons écrire dans telle ou telle colonne d'une annonce, où et comment le candidat doit télécharger des documents. Le gagnant sera celui qui parviendra à résoudre ces problèmes le plus rapidement.

Thèse 2: Personnalisation des modèles de travail

Aujourd'hui, la gestion du personnel implique d'accepter les différences. Hors de question de traiter tous nos collaborateurs de la même manière. Et ils le comprennent. Le principe qui prévaut? Le poste doit être adapté aux préférences et aux besoins personnels. La question qui se pose aux entreprises est la suivante: comment permettre et organiser des profils de travail sur mesure pour que cela génère in fine une plus grande création de valeur? Jusqu'où pouvons-nous nous plier à des talents précieux sans nous renier nous-mêmes? Là encore, il faut innover sur le plan des idées, il faut une ouverture d'esprit. La communication autour de ces nouvelles approches est absolument essentielle. Pas question de concocter des package «secrets» pour certains collaborateurs, ça serait faire fausse route. Ce genre de choses finissent pas se savoir. Et lorsque l’impression qu’il y a inégalité de traitement se répand au sein de l'entreprise, gare au retour de manivelle! Mieux vaut donc jouer cartes sur table. Nous pouvons aussi admettre avoir commis une erreur.

Thèse 3: Les innovations au bureau

Métavers et ChatGPT – on trouvera sur Google la signification de ces abréviations. C’est maintenant qu’il faut faire preuve de finesse. Le RH qui s'intéresse à ChatGPT doit se poser quelques questions. La superbe lettre de motivation de la dernière candidate a-t-elle été rédigée par une intelligence artificielle? Comment l’IA peut-elle nous aider? A quoi devons-nous faire attention? Pour le savoir, rien de mieux que de l’essayer. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons nous familiariser avec la nouvelle réalité. Planifiez des événements internes sur ce thème. Invitez des spécialistes pour vous l'expliquer. L'intelligence artificielle peut être très utile, mais elle peut aussi faire peur. Comment pouvons-nous utiliser le métavers et les réalités virtuelles dans la formation? Ce sont des choses qu'il faut explorer. Mieux vaut le faire tôt que tard. Et qui peut bien savoir qui a écrit le présent article?

Thèse 4: Un salaire différent

La nouvelle génération n'en veut pas à notre argent. Elle lorgne plutôt vers un paquet global de prestations, à savoir: des offres de formation, de jours de vacances, de promotion de la santé, de coaching. Le New Pay est un système écologique aussi attractif que possible. Des places de crèche, des journées joker ou le bar à café cool. La réglementation du temps de travail et l'équipement du poste ou les assurances, les entrées gratuites au centre de yoga. C'est le package qui fait la musique. Et celui-ci doit être parfaitement adapté à la vision et à la mission de l'entreprise. Celui qui se base uniquement sur le salaire annuel ne voit pas assez loin. Il va de soi que ce mix de composants attractifs doit être vendu en conséquence. Google a montré l'exemple. Nous n’allons pas essayer d'imiter Google, mais de comprendre l'état d'esprit qui se cache derrière et de le traduire pour notre propre entreprise: comment développer un mix d'offres crédible et attractif pour notre groupe cible?

Thèse 5: Agile

Les entreprises qui utilisent des formes d'organisation et des méthodes agiles ne sont pas nouvelles. En revanche, les organisations qui les maîtrisent vraiment le sont. Le temps de l'expérimentation est révolu. Les organisations agiles doivent livrer la marchandise. Et elles ne peuvent le faire que si elles travaillent résolument sur elles-mêmes. Nous avons travaillé avec des organisations qui sont quasiment synonymes de nouvelles formes d'organisation en Suisse, et nous avons dû constater qu'il y avait énormément de sable dans les rouages. Nous constatons que les organisations se surmènent, se dépassent elles-mêmes. Il est souvent trop tard pour constater que l'on a été trop loin en cours de route. Résulta: des équipes dysfonctionnelles. Frustrations et déceptions en sont les symptômes. Cette gueule de bois organisationnelle, il faut la combattre, et ça sera la prochaine étape. Faire en sorte que l’organisation puisse fournir davantage de prestations sur un même pied d’égalité, voilà qui devient difficile. Mais il vaut la peine de ne pas abandonner!

Thèse 6: Faire sens

Nous bouclons la boucle avec les nouvelles générations. Si, en tant qu'organisation, nous ne voyons pas de sens profond en dehors du chiffre d'affaires et de l'EBIT, alors nous avons un problème. Beaucoup d'entreprises se traînent encore de bilan annuel en bilan annuel sans avoir de mission ni de vision claire. Souvent sans stratégie ou du moins de manière très opportuniste. Les collaborateurs sont de plus en plus nombreux à ne pas trouver cela très motivant. La génération Z en tête. Les entreprises et leurs postes de travail deviennent de plus en plus des plateformes d'identification pour les collaborateurs. Ils veulent faire partie de quelque chose d'important. De quelque chose de grand qui fait avancer le monde. Le travail devient l'expression de leur propre sentiment et de la conception qu’ils ont d’eux-mêmes. C'est un peu comme si l'on décidait de manger végétalien ou de ne pas porter de vêtements Zara par principe. Le travail est un mode de vie et l'expression de sa propre identité.

Thèse 7: 
 Louer des talents plutôt que les acheter

Nombreuses sont les entreprises qui devront se réorienter face à un marché du travail toujours plus mouvant et dynamique. Le temps que les talents acquièrent les nouvelles compétences, et voilà que le prochain sujet est déjà à l'ordre du jour. S'il est vrai, selon le WEF, que la moitié des emplois nécessiteront une formation continue massive d'ici 2025 1, il nous sera difficile de  répondre à tous ces besoins d'apprentissage en interne. Combler les lacunes dans le personnel par des intérimaires a surtout cours dans les domaines de travail à faible degré de spécialisation. Lorsque des connaissances d'expert ou de nouvelles compétences sont demandées, on est souvent tenté d'embaucher ou de former quelqu'un à l’interne. Pas étonnant donc que l’on ait vu ces dernières années un boom des postes de Chief Digital Officer. A l'avenir, les entreprises devront bien réfléchir si, à moyen terme, il n'est pas beaucoup plus avantageux d'embaucher des talents spécialisés plutôt que de créer immédiatement de nouveaux postes qui viendront gonfler le nombre de salariés.

Thèse 8:
 Être un terrain de jeu pour les talents

Si l'on veut de véritables talents, il faut créer des terrains de jeu spécifiques. Des lieux où ils peuvent s'exprimer, se développer et faire leurs preuves. Les descriptions de poste font que les talents se sentent immédiatement à l’étroit. L'employeur qui se considère plutôt comme une plateforme et une place de marché pour les possibilités de développement ne manquera pas d’attirer les talents. Les structures ouvertes sont très utiles dans ce contexte. Des hiérarchies plates, également. La sécurité psychologique est un autre ingrédient du succès. Ainsi que des formes de travail agiles. Le talent a besoin d'un certain espace pour s’épanouir. Si vous enfermez des personnes passionnantes dans des processus et des protocoles, vous les perdrez rapidement. Mais il y a pire. Les talents sont socialisés dans le système et y restent. Que dit le proverbe? «Celui qui ne nourrit qu’avec des bananes ne doit pas s'étonner de n'avoir que des singes autour de lui». En ces temps de pénurie chronique de talents, il s'agit d'un défi de toute première importance pour toute organisation qui entend avoir des projets d'avenir.

Thèse 9: Le chef, un service

La gestion devient un service. Arrêtons-nous ici un instant. N’est-ce pas là aller à l’encontre de ce que l'on nous a inculqué sur ce thème ces dernières décennies. Nous nous détournons de l'idée que le leadership consiste à amener les collaborateurs à générer efficacement de la valeur ajoutée pour l'entreprise. De cette approche à court terme qui consiste à diriger les collaborateurs vers la création de valeur, nous passons à l'efficacité. Comment puis-je encourager et entretenir les ressources humaines dans l'entreprise de manière à ce qu'elles s'engagent de manière aussi autonome que possible là où elles génèrent le plus d'avantages durables. Même si l'idée du «servant leader» n'est pas nouvelle. Cette approche issue du développement agile de l'entreprise devient le courant dominant pour pérenniser l'organisation.

Résume sur l'avenir du travail

L'une de mes citations préférées dans le contexte de la planification de l'avenir du travail est la suivante: «Le futur est déjà là, et nous sommes déjà en retard». Elle est de Buckminster Fuller. Il est né en 1895 et décédé en 1983. Il n'a même pas connu l'Internet. Mais ces paroles sont toujours valables aujourd'hui. On peut d’ores et déjà percevoir de nombreux signaux de l'avenir. Il n'est pas toujours malin d'être un pionnier. Il n'est pas non plus très intelligent de croire que les choses resteront toujours en l’état. C'est dans cet esprit que je souhaite du courage, de la créativité et de l'enthousiasme lorsqu'il s'agit de regarder l'avenir en face.

Source

1 WEF Future of Jobs Report 2023; www3.weforum.org/docs/ WEF_Future_of_Jobs_2023_News_Release_DE.pdf (abgerufen am 3.10.23).

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