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Devoirs d'informations: Les candidats peuvent-ils faire de fausses déclarations?

Dans le cadre d’une procédure de candidature, la question de savoir comment traiter les informations relatives à l’état de santé des travailleurs potentiels se pose toujours et encore. Le problème se pose de manière exemplaire dans l’arrêt du Tribunal administratif fédéral du 1er juillet 2010.

22/02/2022 De: Sara Licci
Obligations contractuelles

Un travailleur a été embauché par le même employeur à 60% en tant que professionnel du nettoyage et à 40% en tant qu’employé de bureau. Après avoir entrepris d’importants travaux de nettoyage, il a été en incapacité de travail un certain temps pour cause de douleurs dorsales. Il s’est avéré que ce travailleur, avant d’être engagé à cette place, avait auparavant déjà souffert de violentes douleurs au dos. L’employeur l’a licencié du fait qu’il avait, durant le processus de candidature, occulté le fait qu’il avait déjà souffert de dorsalgies. En revanche, le travailleur a considéré que son licenciement était abusif, estimant qu’il ne s’était pas senti obligé d’informer l’employeur à ce propos. Selon lui, la raison de ses douleurs dorsales l’empêchant de travailler était due à un travail beaucoup trop pénible et non pas à ses antécédents médicaux (TAF, arrêt du 1er juillet 2010, A-5849/2009).

Obligations précontractuelles

Déjà au cours du processus de candidature et avant la conclusion du contrat, il existe un rapport juridique entre le candidat et le futur employeur. C’est pourquoi les parties intéressées doivent tenir compte du principe de la bonne foi. Le futur employeur, de par ses questions, ne doit pas porter atteinte aux droits de la personnalité du candidat. Certaines questions sont admissibles lorsqu’elles ont pour but de déterminer si le candidat est apte à occuper la place à pourvoir. Il en résulte que les questions relatives à l’état de santé ne sont admises que s’il existe un lien direct avec l’activité devant être exercée. Si le candidat ment lorsqu’on lui pose une question licite et ne portant pas atteinte à sa personnalité, l’employeur peut alors résilier le contrat de travail ultérieurement sans que cela soit abusif. En théorie, la dissolution du contrat pour dol est aussi envisageable au sens de l’art. 28 CO. Si le futur employeur outrepasse son droit de poser des questions, on ne doit, en principe, pas répondre à la question. Un tel silence, dans le cadre d’un entretien de candidature, aurait pour effet que le candidat ne serait pas retenu. C’est pourquoi, dans pareille situation, intervient le «droit de entir par nécessité». Ainsi, afin de protéger sa personnalité, le candidat peut fournir une réponse mensongère lorsque la question n’est pas admissible. Ce type de comportement trompeur ne déploie aucun effet. C’est ainsi qu’une femme enceinte peut prétendre qu’elle ne l’est pas lorsqu’elle se présente simplement pour occuper un emploi dans un bureau.

Obligation de renseigner

On peut donc déduire de l’obligation de se comporter selon les règles de la bonne foi et de ne pas tromper son partenaire contractuel une obligation, pour le candidat, de renseigner et de déclarer. Dans le cadre de l’obligation de renseigner, il convient de déterminer s’il faut répondre conformément à la vérité et de manière complète à une question relative à l’état de santé. Sont soumises à l’obligation de renseigner toutes les questions admissibles que peut poser le futur employeur du moment qu’il a un intérêt justifié à les poser. Sont admises les questions portant sur les maladies existantes pour autant que celles-ci soient de nature à affecter les aptitudes du candidat à accomplir les tâches de l’emploi qu’il postule. Les questions concernant des maladies chroniques ainsi que les phases aiguës de ces dernières sont admissibles si elles fournissent des renseignements quant aux aptitudes du candidat à accomplir des tâches spécifiques. Ceci est aussi valable quant à la question de savoir si l’on doit prévoir de futures atteintes à la santé en rapport avec une maladie chronique.

Il en va autrement lorsqu’il s’agit de questions portant sur des maladies antérieures. Il ne faut y répondre que lorsqu’une rechute est possible. Dans un arrêt datant de 2002, le Tribunal fédéral a considéré que, de manière générale, l’on ne pouvait pas poser de questions sur des maladies existantes ou antérieures. La question portant sur des maladies antérieures ne peut en tous cas pas être posée simplement en vue de planifier à l’avance des absences prévisibles (TF DTA 2002, 25, 26). Il existe cependant une obligation de renseigner pour les candidats lorsqu’ils savent d’avance qu’ils seront indisponibles en raison d’un traitement ou d’une opération.

Obligation de déclarer

En principe, dans le cadre d’un processus de candidature, chaque partie doit faire en sorte d’obtenir des données qui sont importantes à ses yeux. Le candidat n’est pas obligé de fournir de lui-même des informations que l’employeur potentiel peut se procurer de son propre chef. En outre, le candidat ne peut pas utiliser à son avantage une erreur flagrante de la part de l’employeur et doit expliquer à celui-ci les faits d’importance qu’il ne connaît pas ou qu’il devrait connaître. Cette obligation de déclarer existe avant tout lorsque le candidat reconnaît qu’en raison de ses souffrances actuelles, il ne pourra pas fournir la prestation de travail en question respectivement lorsqu’il apparaît qu’il est absolument inapte à occuper l’emploi dont il est question. En ce sens, le candidat est soumis à l’obligation de déclarer lorsqu’il est pratiquement exclu que celui-ci accomplisse la prestation contractuelle demandée ou qu’il en soit grandement empêché. La question de savoir s’il existe une obligation de déclarer dépend fortement de l’activité en cause et de la position occupée.

Les limites de la sélection subjective

Il y a lieu de remarquer que l’employeur privé n’est pas tenu de prendre une décision d’embauche sur la base de critères objectifs. Sa décision, relevant de l’autonomie privée, peut résulter de ses préférences subjectives. Toutefois, il existe certains critères de distinction sensibles, spécifiquement protégés par la Constitution et la loi, qui fixent une limite en matière de décision de sélection relevant de l’autonomie privée. Si la décision d’embauche de l’employeur repose sur des critères sensibles, il agit d’une manière contraire au droit s’il n’en donne pas les motifs de justification objectifs. Le Tribunal administratif fédéral a décidé, pour le cas mentionné ici en début d’article, que les questions relatives aux douleurs dorsales existantes posées durant le processus de candidature au moyen d’un questionnaire dans le cadre duquel il convenait de cocher la maladie spécifique, étaient suffisantes (TF, arrêt du 1er juillet 2010, A-5849/2009). Concernant son emploi de bureau, l’information n’était en soi pas pertinente. Il existait cependant un rapport direct et manifeste en lien avec une activité physiquement exigeante en tant que personnel de nettoyage. Le candidat a donc enfreint son obligation de renseigner en répondant de manière inexacte aux questions. La résiliation a été considéré comme disproportionnée pour d’autres raisons.

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