Surveillance des employés: Quelles sont ses limites?

Vidéosurveillance, suivi GPS et autres outils techniques offrent de nombreuses possibilités de contrôle et de surveillance des employés. La surveillance technique sur le lieu de travail est toutefois soumise aux dispositions du droit du travail et de la protection des données, qui doivent absolument être respectées. L'article suivant offre un aperçu des bases juridiques et vous montrera, à l'aide de deux cas pratiques, quelles sont les dispositions à observer.

14/07/2025 De: Stefan Eichenberger, Marius Vischer
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Bases juridiques des systèmes de contrôle de surveillance des employés

Les bases juridiques des systèmes de contrôle et de surveillance des employés trouvent leur source dans le Code des obligations (CO), dans la loi sur le travail (LTr), y compris l'Ordonnance 3 relative à la loi sur le travail (OLT3) qui en fait partie, ainsi que dans la loi sur la protection des données (LPD).

L'employeur entretient un devoir d'assistance envers ses employés. L'art. 328 CO exige de l'employeur qu'il protège la personnalité du travailleur; il doit prendre toutes les mesures dont l'expérience a démontré la nécessité, que l'état de la technique permet d'appliquer et qui sont adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail peuvent équitablement être exigés de lui. L'art. 328b CO spécifie en outre que l'employeur ne peut traiter les données concernant l'employé que dans la mesure où elles portent sur les aptitudes de ce dernier à remplir son emploi ou sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail. Pour le reste, il est fait référence à la loi sur la protection des données.

Dans la loi sur le travail, l'art. 6 s'inspire de l'art. 328 CO et oblige l'employeur à prévoir les mesures nécessaires pour protéger l'intégrité personnelle des travailleurs. En ce qui concerne la surveillance des employés, l'art. 26 OLT3 est plus concret. Les systèmes de surveillance et de contrôle destinés à surveiller le comportement des travailleurs sur le lieu de travail ne sont en principe pas autorisés. Une surveillance technique sur le lieu de travail n'est autorisée que si elle est nécessaire pour d'autres raisons; elle doit en outre être conçue et disposée de telle sorte qu'elle ne porte pas atteinte à la santé et à la liberté de mouvement des travailleurs.

L'article 13 LPD précise que toute atteinte à la personnalité est illicite si elle n'est pas justifiée par un motif justificatif tel que le consentement de la personne lésée, par un intérêt prépondérant d'ordre privé, public ou légal. Il y a atteinte à la personnalité lorsque les principes de traitement des données, tels que les principes de proportionnalité, de bonne foi et de transparence, ne sont pas respectés. En ce qui concerne la surveillance technique sur le lieu de travail, il faut en outre tenir compte du fait que le consentement n'a qu'une efficacité limitée, le caractère volontaire de la chose étant limité par le rapport de subordination entrant en jeu.

Cas pratique 1: Localisation de véhicules professionnels par GPS

Un employeur peut en principe localiser ses véhicules d'entreprise au moyen d'un GPS si cela est fait à des fins d'optimisation économique des trajets par des opérateurs. Les conditions suivantes doivent être respectées:

  • Intérêt prépondérant: une pesée des intérêts doit être effectuée au cas par cas entre l'intérêt de l'entreprise pour l'employeur et la protection de la personnalité de l'employé. Un suivi GPS permettant de déterminer la géolocalisation d'un véhicule d'un prestataire de services (p. ex. un monteur) relève de l'intérêt prépondérant de l'entreprise, selon le guide de l'OLT3.
  • Proportionnalité: les systèmes de surveillance et de contrôle doivent être conçus et utilisés de manière à limiter au maximum la mise en danger de la personnalité du travailleur. Il convient dès lors de choisir le système qui porte le moins atteinte à la personnalité du travailleur. En outre, il y a lieu d'établir un document contenant des indications sur le mode d'action, le type et le moment des enregistrements de ce système GPS.
  • Protection des données et de la personnalité: le traitement des données personnelles des travailleurs doit respecter les principes généraux de traitement des données. Le traitement des données personnelles doit donc toujours être effectué de manière transparente pour les personnes concernées. Les personnes concernées doivent être informées au préalable et en détail de la nature, du but et de la finalité du traitement. Seules les données personnelles pertinentes ou utiles peuvent être traitées. Celles-ci doivent être effacées après un délai aussi court que possible et fixé à l'avance. L'accès aux fichiers doit être limité aux personnes habilitées à les exploiter. L'archivage n'est pas autorisé. L'utilisation des données et leur exploitation doivent être réglées au sein de l'entreprise. Il convient également d'élaborer un règlement interne à l'entreprise qui informe de manière transparente les travailleurs de leurs droits et obligations lors de l'utilisation du système GPS et de la manière dont s'effectuent le contrôle et la surveillance au sein de l'entreprise. Un travailleur devrait en outre avoir la possibilité d'arrêter manuellement la localisation par GPS, notamment s'il est autorisé à utiliser le véhicule à des fins privées (par exemple pour se rendre au travail, à un rendez-vous médical, pour une pause, etc.).
  • Information et consultation des travailleurs: si le suivi par GPS devait être utilisé pour surveiller les travailleurs en plus de son objectif premier, à savoir une meilleure utilisation des véhicules, les travailleurs ont le droit d'être informés et consultés par l'employeur. Les obstacles juridiques sont ici nettement plus importants. Un tel procédé est autorisé de manière sporadique pour contrôler le temps de travail ou pour prévenir les abus. Une surveillance totale et permanente des employés sur leur lieu de travail est en principe interdite.
  • Droit de regard des autorités d'exécution: les autorités d'exécution de la loi sur le travail doivent avoir accès, à leur demande, à tous les documents et données du système GPS exploité.

Cas pratique 2: Vidéosurveillance sur le lieu du travail

Les conditions suivantes doivent être respectées en cas de vidéosurveillance sur le lieu de travail:

  • Subsidiarité: en principe, les installations de vidéosurveillance sur le lieu de travail ne devraient être utilisées que si l'objectif visé ne peut pas être atteint par des mesures moins contraignantes.
  • Motifs: pour des raisons d'organisation, de sécurité ou de gestion de la production, la vidéosurveillance peut être autorisée. Dans ce cas, l'employé ne doit pas être filmé par la caméra ou seulement à titre exceptionnel. Les caméras de surveillance peuvent être placées par exemple à proximité des accès ou des entrées, des passages, des machines et installations dangereuses, des chambres fortes ou des entrepôts contenant des biens de valeur. Ces zones surveillées doivent être signalées par des panneaux ou des pictogrammes appropriés placés à hauteur des yeux, de manière à ce que la surveillance soit bien visible. Dans ces cas, la vidéosurveillance constitue une forme de surveillance technique sur le lieu de travail. Il convient par conséquent d'accorder un soin particulier à l'utilisation que l'on en fait, qui doit être transparente et proportionnée.
  • Période d'enregistrement: la période d'enregistrement doit être aussi courte que possible et ne doit pas être utilisée à des fins de surveillance du comportement.
  • Conservation: la conservation des enregistrements doit être limitée dans le temps. La durée de conservation des données dépend de l'objectif de la surveillance. En règle générale, l'effacement doit avoir lieu dans les 24 à 72 heures.
  • Infraction pénale/Soupçon d'infraction pénale: la surveillance des employés en cas d'infraction pénale ou de soupçon d'infraction pénale présuppose en principe que la mesure a été ordonnée par un juge ou par la police judiciaire après le dépôt d'une plainte. L'utilisation autonome d'une caméra vidéo est également possible, pour autant qu'il y ait un soupçon concret d'infraction. Même dans ces cas, la vidéosurveillance est considérée comme une surveillance technique sur le lieu de travail et est soumise à des exigences strictes en matière de protection des données et de droit de la personnalité. C'est le tribunal compétent qui décide si les enregistrements vidéo sont finalement admis comme preuve dans une procédure pénale.
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