Contrat de travail suisse: Contenus pertinents

Le contrat de travail suisse n’est soumis à aucune forme particulière, sauf si la loi en dispose autrement (art. 320, al. 1 CO). Il est toutefois toujours recommandé de régler les points contractuels fondamentaux dans un contrat écrit.

16/06/2025 De: Katja Rauber, Simone Wetzstein
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Forme du contrat de travail suisse

Sauf disposition contraire de la loi, le contrat individuel de travail n’est soumis à aucune forme spéciale (art. 320, al. 1 CO). Il est réputé conclu lorsque l’employeur accepte pour un temps donné l’exécution d’un travail qui, d’après les circonstances, ne doit être fourni que contre un salaire (art. 320, al. 2 CO).

L’employeur paie au travailleur le salaire convenu (art. 322, al. 1 CO). Celui-ci peut résulter d'une convention collective de travail, d'un contrat-type de travail ou d'une enquête statistique sur les salaires. Si le nom des parties, le début des rapports de travail, la fonction du travailleur, le salaire, les éventuels suppléments de salaire et la durée hebdomadaire du travail ne figurent pas dans un contrat écrit, l'employeur doit informer le travailleur par écrit sur ces points dans un délai d'un mois à compter du début des rapports de travail, pour autant que ceux-ci soient de durée indéterminée ou qu'ils aient été conclus pour plus d'un mois (art. 330b, al. 1 CO).

Important: pour des raisons de preuve notamment, il est recommandé d’établir tout contrat de travail suisse par écrit.

En outre, le CO prévoit impérativement la forme écrite pour les accords suivants, conclus entre l'employeur et le travailleur dans le cadre d’un contrat de travail suisse:

  • accord selon lequel la rémunération des heures de travail supplémentaires est incluse dans le salaire fixe (art. 321c, al. 3 CO) ;
  • accord écrit prévoyant que le droit à la provision s’acquiert lors de l’exigibilité de chaque acompte ou à chaque prestation (art. 322b, al. 2 CO);
  • accord selon lequel l'échéance de la provision est, pour certaines opérations, reportée au-delà de la période de paiement légale (art. 323, al. 2 CO);
  • dérogation à la réglementation légale concernant le maintien du salaire en cas d'empêchement de travailler, c'est-à-dire pour l'accord selon lequel les prestations de l'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie remplacent l'obligation légale de maintien du salaire (art. 324a al. 4 CO);
  • accord sur les frais forfaitaires (art. 327a al. 2 CO);
  • convenir d'une date après la fin des rapports de travail pour la restitution de la sûreté (art. 330 al. 2 CO);
  • accord selon lequel l'employeur acquiert les inventions fortuites du travailleur contre une rémunération spéciale et équitable (art. 332, al. 2 CO);
  • dérogation aux règles légales sur le temps d'essai (art. 335b, al. 2 CO);
  • dérogation aux délais de congé légaux (art. 335c, al. 2 CO);
  • accord selon lequel les droits de provision du travailleur sur les affaires exécutées après les rapports de travail ne sont exigibles qu'après la fin des rapports de travail (art. 339, al. 2 CO);
  • accord sur le montant et l'échéance ultérieure des indemnités de départ (art. 339c, al. 1 et al. 4 CO);
  • accord portant sur une prohibition de faire concurrence post-contractuelle (art. 340, al. 1 CO);
  • accord portant sur la cessation de la contravention (art. 340b, al. 3, CO).

Enfin, la forme écrite est notamment prescrite pour les types particuliers de contrats individuels de travail suivants:

  • Pour être valable, le contrat d'apprentissage doit revêtir la forme écrite et régler au moins la nature et la durée de la formation professionnelle, le salaire, le temps d'essai, la durée du travail et les vacances (art. 344a, al. 1 et 2 CO).
  • Le contrat d'engagement des voyageurs de commerce doit être réglé par un contrat écrit, quand bien même la forme écrite n'est pas formellement requise. Il doit contenir des dispositions sur la durée et la fin des rapports de travail, les pouvoirs du voyageur de commerce, la rémunération et le remboursement des frais, ainsi que sur le droit applicable et le for, si l'une des parties contractantes est domiciliée à l'étranger (art. 347a, al. 1 et 2 CO).
  • Le contrat de travail à domicile est en principe valable sans forme particulière. Avant de confier du travail au travailleur, l’employeur lui indique chaque fois les modalités importantes de l’exécution, notamment les particularités non spécifiées dans des conditions générales de travail; il mentionne le matériel à fournir par le travailleur et indique par écrit l’indemnité due pour ce matériel, ainsi que le salaire (art. 351a, al. 1 CO).
  • Selon l’art. 19, al. 1 à 3 LSE, le bailleur de services doit, en règle générale, conclure un contrat écrit avec le travailleur, quoique le Conseil fédéral puisse gérer les exceptions. Le contrat contiendra les points suivants: le genre de travail à fournir, le lieu de travail et le début de l’engagement, la durée de l’engagement ou le délai de congé, l’horaire de travail, le salaire, les indemnités et allocations éventuelles ainsi que les déductions afférentes aux assurances sociales; les prestations dues en cas d’heures supplémentaires, de maladie, de maternité, d’accident, de service militaire et de vacances, les dates de paiement du salaire, des allocations et des autres prestations. Si les exigences relatives à la forme ou au contenu ne sont pas remplies, les conditions de travail selon les usages locaux et professionnels ou les dispositions légales en la matière sont applicables, à moins que des conditions plus favorables aient été conclues verbalement.
  • Pour être valable, le contrat d'engagement doit revêtir la forme écrite (art. 69, al. 2 LNM/ Loi fédérale sur la navigation maritime sous pavillon suisse).

Important: par «forme écrite», au sens du CO, on entend la signature manuscrite du contrat ou sa signature au moyen d'une signature électronique qualifiée assorti d’un horodatage qualifié, conformément à la loi fédérale sur la signature électronique (art. 13 en relation avec l'art. 14 CO). Une signature copiée ou une signature via DocuSign ne répondent pas aux exigences de la forme écrite. Si une prohibition de faire concurrence est convenue dans un contrat de travail, mais que celui-ci n'a été signé que via DocuSign, la prohibition de faire concurrence correspondante n'a pas été convenue valablement et n'est pas exécutable. Il est donc décisif de respecter cette exigence.

Si le travailleur fournit de bonne foi un travail pour l’employeur en vertu d’un contrat de travail suisse qui se révèle nul par la suite, tous deux sont tenus de s’acquitter des obligations découlant des rapports de travail, comme s’il s’agissait d’un contrat valable, jusqu’à ce que l’un ou l’autre mette fin aux rapports de travail en raison de l’invalidité du contrat (art. 320, al. 3 CO).

Aperçu du contenu d’un contrat de travail suisse

Tout contrat de travail suisse devrait stipuler au moins les éléments suivants:

  • les parties au contrat;
  • le lieu de travail et l'obligation éventuelle d'effectuer des voyages d'affaires;
  • la fonction, les obligations et les responsabilités du travailleur;
  • le début de la relation de travail;
  • une réglementation précisant si et dans quelles conditions une activité accessoire est autorisée;
  • la durée du temps d'essai et délai et date de résiliation pendant celui-ci ou une éventuelle renonciation à toute période d'essai ;
  • la durée/date de fin des rapports de travail (dans un contrat de travail suisse à durée déterminée) et/ou délai et date de résiliation après la fin du temps d'essai;
  • le temps de travail et la réglementation concernant les heures supplémentaires ainsi que le travail supplémentaire;
  • les vacances, jours fériés et temps libre (en particulier, en cas d'accord de télétravail, il convient de régler le régime des jours fériés applicable);
  • le salaire, gratification éventuelle et déductions salariales (p. ex. cotisations aux assurances sociales, primes d'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie ou impôt à la source éventuel);
  • les frais de déplacement;
  • le maintien du paiement du salaire en cas d'incapacité de travail (c.-à-d. quel barème cantonal de maintien du paiement du salaire est applicable ou s'il existe une assurance d'indemnités journalières en cas de maladie qui complète ou remplace l'obligation légale de maintien du paiement du salaire);
  • le choix du droit applicable (au moins en cas de relation internationale).

Si des règlements doivent faire partie intégrante du contrat de travail, le candidat doit avoir l'occasion d'en prendre connaissance avant la conclusion du contrat. Le meilleur moyen de s'en assurer est d'envoyer ou de remettre ces règlements au candidat en même temps que le contrat de travail. En ce qui concerne les règlements, il convient de veiller à ce que ceux qui détaillent les instructions de l'employeur (p. ex. règlements relatifs aux frais, à l'utilisation du véhicule de service, aux horaires de travail, etc.) ne fassent pas partie intégrante du contrat de travail: toute adaptation (que l'employeur pourrait faire unilatéralement en vertu de la loi) nécessiterait alors l'accord du travailleur. En revanche, le règlement du personnel fait, lui, partie du contrat de travail et devrait donc faire partie intégrante du contrat de travail individuel.

Important: les clauses pour lesquelles la forme écrite est prescrite conformément à ce qui précède ou qui sont inhabituelles devraient être intégrées directement dans le contrat de travail et non pas simplement prévues dans le règlement. Nous conseillons donc d'inclure dans le contrat de travail les clauses de non-concurrence post-contractuelles ou les dispositions prévoyant que les éventuelles heures supplémentaires soient compensées par le salaire.

Personne du travailleur

Il est, en principe, interdit d’employer des jeunes gens âgés de moins de 15 ans révolus.  (art. 30, al. 1 LTr). Les contrats de travail conclus avec des mineurs ou des personnes sous curatelle de portée générale requièrent toutefois l'accord de leur représentant légal (art. 17 LTr en relation avec l'art. 19, al. 1 CC). Pour les travailleurs mineurs, il convient en outre de respecter les dispositions de protection spéciale de la loi sur le travail (art. 29 ss. LTr) et de l'Ordonnance sur la protection des jeunes travailleurs (OLT 5).

En cas d'emploi de travailleurs étrangers, il convient de vérifier si un permis de travail est nécessaire et de s'assurer régulièrement que le permis initialement accordé est toujours en vigueur.

Contrat de travail 

Il n'est pas toujours facile de déterminer si un accord constitue un contrat de travail ou un autre type de contrat. En cas de doute, il ne faut pas se baser sur la désignation du contrat en question, mais examiner ce que les parties ont effectivement voulu. Les autorités ont tendance à considérer qu'en cas de doute, il s'agit plutôt d'un contrat de travail.

Caractéristiques du contrat de travail

Les critères importants, qui indiquent l'existence d'un contrat de travail, sont les suivants:

  • fourniture d'une prestation de travail pour un tiers;
  • intégration dans une organisation de travail étrangère, c'est-à-dire existence d'un rapport de subordination;
  • existence d'un contrat de durée;
  • salaire en contrepartie de la prestation de travail.

Les questions suivantes permettent par exemple d’en déceler des indices:

  • Qui prend en charge les dépenses nécessaires de la partie qui fournit le travail ?
  • Qui paie les cotisations aux assurances sociales ?
  • Dans quelle mesure la partie qui fournit le travail est-elle libre de répartir le travail et les heures de travail, de choisir le mode d'exécution et le lieu de travail ?
  • Des vacances rémunérées sont-elles accordées ?

Remarque: même si le travail est effectué sans accord explicite ou si un accord n'est pas qualifié de contrat de travail par les parties, les dispositions légales relatives au contrat de travail s'appliquent s'il s’avère que le contenu de l’accord abonde dans le sens d’un contrat de travail selon les déclarations concordantes des parties.

Dans la pratique, c'est surtout la distinction entre le contrat de travail et le mandat ainsi que le contrat d'entreprise qui pose régulièrement problème.

Distinction entre contrat de travail et mandat

Le mandat est un contrat par lequel le mandataire s’oblige, dans les termes de la convention, à gérer l’affaire dont il s’est chargé ou à rendre les services qu’il a promis (art. 394, al. 1 CO). La principale différence entre le contrat de travail et le mandat réside dans l'intégration dans une organisation de travail étrangère, c'est-à-dire dans le rapport de subordination du travailleur vis-à-vis de l'employeur. Par rapport au travailleur, le mandataire est plus autonome dans l'exécution de sa prestation de travail et moins soumis à des directives. Comme le travailleur, le mandataire s'engage à travailler avec soin et à viser un résultat qui n'est toutefois pas exigé par le contrat. Une rémunération est due au mandataire si la convention ou l’usage lui en assure une (art. 394, al. 3 CO). Le mandant doit rembourser au mandataire, en principal et intérêts, les avances et frais que celui-ci a faits pour l’exécution régulière du mandat, et le libérer des obligations par lui contractées (art. 402, al. 1 CO). Le mandat peut, à la différence d’un contrat de travail, être révoqué ou répudié en tout temps (art. 404 CO). 

Distinction entre contrat de travail et contrat d’entreprise

Le contrat d’entreprise est un contrat par lequel une des parties (l’entrepreneur) s’oblige à exécuter un ouvrage, moyennant un prix que l’autre partie (le maître) s’engage à lui payer (art. 363 CO). Contrairement au travailleur et au mandataire, l'entrepreneur, dans le cadre d'un contrat d'entreprise, doit au maître un résultat déterminé et pas seulement une activité minutieuse. Une autre différence par rapport au contrat de travail réside dans le fait que l'entrepreneur ne s'intègre pas dans l'organisation du travail du maître et qu'il n'existe donc pas de lien de subordination entre les parties d'un contrat d'entreprise. Le droit d'instruction du maître est moins étendu que celui de l'employeur et se rapporte principalement à l'ouvrage. En revanche, la répartition du travail et du temps de travail ainsi que la manière de l'exécuter sont du ressort de l'entrepreneur.

Remarque: s'il existe un mandat ou un contrat d'entreprise, le mandataire ou l'entrepreneur est responsable du paiement des cotisations aux assurances sociales.

Exemple: les contrats conclus avec de véritables indépendants sont souvent des contrats d'entreprise ou des mandats, selon qu'il s'agit de fournir un travail ou simplement d'agir avec soin.

Risques liés à la pseudo-indépendance

Les employeurs qui confient des travaux à des prestataires de services prétendument indépendants au lieu de conclure des contrats de travail devraient toujours s'assurer qu'il n'existe aucune pseudo-indépendance. Il y a pseudo-indépendance lorsque les parties n'ont pas conclu un contrat de travail, mais un autre contrat, notamment un contrat de mandat ou d'entreprise, mais qu'il existe de facto une relation de travail entre les parties en raison de la présence d'éléments d'un contrat de travail décrits ci-dessus. Parmi les critères utilisés pour déterminer s'il s'agit d'une pseudo-indépendance figurent notamment la durée et la fréquence de la collaboration, la nature de l'activité, le degré d'autonomie ou de subordination, la rémunération et la dépendance économique. Si une autorité ou un tribunal conclut à l'existence d'une pseudo-indépendance, les employeurs peuvent être contraints, en cas d'infraction à la législation sur le travail, les assurances sociales ou les impôts, de verser des paiements rétroactifs - comme par exemple des salaires, des indemnités pour licenciement abusif, des cotisations aux assurances sociales ou des impôts (plus intérêts). De fortes amendes peuvent également être infligées.

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